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Abstract
Dans les années 1980, l’URSS est une entité politique multiscalaire, à la fois simple État et superpuissance de guerre froide. L’interaction entre ces deux espaces de projection (national et transnational) met en jeu la capacité des institutions – étatiques et partisanes – soviétiques à configurer la doctrine de l’internationalisme socialiste. Celle-ci, au sens foucaldien du terme, fonctionne comme un double système de contrainte : elle lie l’URSS à un discours particulier, qui lui donne en retour un pouvoir sur les membres du bloc socialiste qui le reçoivent. La réforme de la gouvernance économique de l’URSS avec la Perestroïka doit donc être pensée dans l’impact qu’elle a sur les démocraties populaires autant que dans l’effet retour que cette évolution des principes économiques du socialisme à l’échelle du bloc a sur l’URSS. Cet article s’intéresse à la façon dont l’organisation de coopération économique multilatérale des États socialistes, le CAEM, devient un agent d’une production transnationale de la réforme économique du socialisme dans les années 1980, qui échappe en partie à l’URSS, tout en influençant politiquement et économiquement les marges de manœuvre de celle-ci dans ses propres réformes. L’impossible décorrélation entre principes de rationalité de la gouvernance soviétique à l’échelle de l’URSS et gouvernementalité socialiste de l’économie-monde, construite depuis 1949 à l’échelle du bloc de l’Est, éclaire alors la dimension transnationale des réformes soviétiques des années 1980, dont la mise en œuvre locale ne peut s’affranchir d’une compréhension de leur mise en débat à l’échelle internationale.