B. Aubriot , A. Servettaz , J.C. Kleiber , J.J. Hidalgo Diaz , C. Boulagnon , M. Colombat , J. Costa , A. Robbins
{"title":"Prévalence des dépôts amyloïdes chez les patients opérés d’un syndrome du canal carpien : une cohorte française monocentrique","authors":"B. Aubriot , A. Servettaz , J.C. Kleiber , J.J. Hidalgo Diaz , C. Boulagnon , M. Colombat , J. Costa , A. Robbins","doi":"10.1016/j.revmed.2024.04.391","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Introduction</h3><p>La cardiopathie amyloïde est une pathologie grave qui est souvent précédée de plusieurs années par un syndrome du canal carpien. L’identification précoce des patients atteints d’amylose au moment d’une chirurgie de canal carpien pourrait amener à un traitement plus précoce et ainsi améliorer le pronostic.</p><p>Dans cette étude, nous avons cherché à déterminer la prévalence des dépôts amyloïdes dans les tissus ténosynoviaux chez les patients opérés d’un syndrome du canal carpien, puis, chez les patients positifs, la prévalence de la cardiopathie amyloïde.</p></div><div><h3>Patients et méthodes</h3><p>Il s’agissait d’une étude monocentrique rétrospective chez les patients opérés d’un syndrome du canal carpien entre juillet 2022 et juillet 2023 dans notre centre. Des biopsies peropératoires systématiques de tissu ténosynovial étaient réalisées puis colorées au rouge Congo. Le cas échéant, le type de dépôts était déterminé par immunohistochimie, immunofluorescence et spectrométrie de masse si nécessaire. Les patients avec des dépôts amyloïdes confirmés étaient ensuite évalués sur le plan cardiaque et une prise en charge adaptée était mise en place en fonction de la nature des dépôts.</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>137 biopsies de tissu ténosynovial ont pu être réalisées parmi 129 patients distincts (8 patients opérés à deux reprises). L’âge médian des patients correspondants était de 54<!--> <!-->ans et 35 % des prélèvements concernaient des hommes. Sur ces 137 biopsies, 14 (10,2 %) issues de patients différents ont montré des dépôts amyloïdes : 11 de type transthyrétine (ATTR), les trois autres étant indéterminés. À ce jour, seulement 5 résultats d’analyse génétique nous sont parvenus, ne mettant pas en évidence de variant du gène de la transthyrétine. Les patients qui avaient des prélèvements positifs étaient significativement plus âgés que ceux qui n’en avaient pas (75 vs 53<!--> <!-->ans, <em>p</em> <!--><<!--> <!-->0,0001). 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Le score NAC était à 0.</p></div><div><h3>Discussion</h3><p>Les résultats de cette cohorte française sont comparables à ceux d’autres études internationales, tant sur la prévalence globale dépôts amyloïdes que sur le lien entre leur présence et un âge plus élevé. Bien que cela soit classiquement décrit, le sexe masculin et un antécédent de canal lombaire étroit n’étaient pas significativement associés à la présence de dépôts amyloïdes. En revanche, d’autres manifestations connues d’amylose systémique étaient associés à la positivité des biopsies comme un antécédent de doigt à ressaut, de maladie de Dupuytren ou de rupture distale du biceps. Ces éléments pourraient permettre de mieux cibler les patients à risque de cardiopathie amyloïde au moment d’une chirurgie de canal carpien, et donc d’identifier ceux qui bénéficieraient le plus d’une éventuelle biopsie. En effet, la réalisation d’une biopsie impose une chirurgie à ciel ouvert, ce qui est contraigant à l’ère des chirurgies mini-invasives par voie endoscopique. Par ailleurs, l’analyse anatomopathologique par les techniques de coloration au rouge Congo, l’immunohistochimie et l’immunofluorescence reste difficile et nécessite d’impliquer un praticien expérimenté, même si dans notre étude l’accès à la spectrométrie de masse a permis d’affirmer nos diagnostics anatomopathologiques avec plus de certitude. Enfin, il n’existe pas de recommandations précises concernant la place des traitements actuels de la cardiopathie amyloïde chez ces patients potentiellement asymptomatiques sur le plan cardiaque, ce qui soulève des questions médicoéconomiques.</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>Dans cette cohorte française de patients opérés d’un syndrome du canal carpien, des dépôts amyloïdes ont été observés dans 10,2 % (14/137) des biopsies de tissu ténosynovial, principalement de type ATTR. Parmi ces 14 patients, un seul patient avait une atteinte cardiaque au moment de la chirurgie. La réalisation de ces biopsies chez les patients les plus à risque d’amylose pourrait permettre un diagnostic plus précoce d’une atteinte cardiaque et un meilleur pronostic grâce à l’initiation d’un traitement au moment opportun.</p></div>","PeriodicalId":0,"journal":{"name":"","volume":"45 ","pages":"Pages A95-A96"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2024-06-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"","FirstCategoryId":"3","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0248866324004843","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"","JCRName":"","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Introduction
La cardiopathie amyloïde est une pathologie grave qui est souvent précédée de plusieurs années par un syndrome du canal carpien. L’identification précoce des patients atteints d’amylose au moment d’une chirurgie de canal carpien pourrait amener à un traitement plus précoce et ainsi améliorer le pronostic.
Dans cette étude, nous avons cherché à déterminer la prévalence des dépôts amyloïdes dans les tissus ténosynoviaux chez les patients opérés d’un syndrome du canal carpien, puis, chez les patients positifs, la prévalence de la cardiopathie amyloïde.
Patients et méthodes
Il s’agissait d’une étude monocentrique rétrospective chez les patients opérés d’un syndrome du canal carpien entre juillet 2022 et juillet 2023 dans notre centre. Des biopsies peropératoires systématiques de tissu ténosynovial étaient réalisées puis colorées au rouge Congo. Le cas échéant, le type de dépôts était déterminé par immunohistochimie, immunofluorescence et spectrométrie de masse si nécessaire. Les patients avec des dépôts amyloïdes confirmés étaient ensuite évalués sur le plan cardiaque et une prise en charge adaptée était mise en place en fonction de la nature des dépôts.
Résultats
137 biopsies de tissu ténosynovial ont pu être réalisées parmi 129 patients distincts (8 patients opérés à deux reprises). L’âge médian des patients correspondants était de 54 ans et 35 % des prélèvements concernaient des hommes. Sur ces 137 biopsies, 14 (10,2 %) issues de patients différents ont montré des dépôts amyloïdes : 11 de type transthyrétine (ATTR), les trois autres étant indéterminés. À ce jour, seulement 5 résultats d’analyse génétique nous sont parvenus, ne mettant pas en évidence de variant du gène de la transthyrétine. Les patients qui avaient des prélèvements positifs étaient significativement plus âgés que ceux qui n’en avaient pas (75 vs 53 ans, p < 0,0001). Une durée des symptômes ≥ à 2 ans (p = 0,024), une compression ulnaire présente à l’électromyogramme (p = 0,020), un antécédent de doigts à ressaut (p = 0,0005), de maladie de Dupuytren (p = 0,0001) et de rupture distale du biceps (p = 0,010) étaient associés à la présence de dépôts amyloïdes. Sur les 13 patients qui ont été évalués sur le plan cardiaque, un seul avait une cardiopathie amyloïde avérée. Il s’agissait d’un patient de 86 ans pour lequel l’ETT retrouvait une hypertrophie ventriculaire (SIVd 15 mm) avec un strain longitudinal global à –17,4 %. L’IRM cardiaque confirmait l’hypertrophie avec une augmentation des valeurs de T1 mapping. La scintigraphie au Tc99m montrait une fixation myocardique Perugini 1. Le score NAC était à 0.
Discussion
Les résultats de cette cohorte française sont comparables à ceux d’autres études internationales, tant sur la prévalence globale dépôts amyloïdes que sur le lien entre leur présence et un âge plus élevé. Bien que cela soit classiquement décrit, le sexe masculin et un antécédent de canal lombaire étroit n’étaient pas significativement associés à la présence de dépôts amyloïdes. En revanche, d’autres manifestations connues d’amylose systémique étaient associés à la positivité des biopsies comme un antécédent de doigt à ressaut, de maladie de Dupuytren ou de rupture distale du biceps. Ces éléments pourraient permettre de mieux cibler les patients à risque de cardiopathie amyloïde au moment d’une chirurgie de canal carpien, et donc d’identifier ceux qui bénéficieraient le plus d’une éventuelle biopsie. En effet, la réalisation d’une biopsie impose une chirurgie à ciel ouvert, ce qui est contraigant à l’ère des chirurgies mini-invasives par voie endoscopique. Par ailleurs, l’analyse anatomopathologique par les techniques de coloration au rouge Congo, l’immunohistochimie et l’immunofluorescence reste difficile et nécessite d’impliquer un praticien expérimenté, même si dans notre étude l’accès à la spectrométrie de masse a permis d’affirmer nos diagnostics anatomopathologiques avec plus de certitude. Enfin, il n’existe pas de recommandations précises concernant la place des traitements actuels de la cardiopathie amyloïde chez ces patients potentiellement asymptomatiques sur le plan cardiaque, ce qui soulève des questions médicoéconomiques.
Conclusion
Dans cette cohorte française de patients opérés d’un syndrome du canal carpien, des dépôts amyloïdes ont été observés dans 10,2 % (14/137) des biopsies de tissu ténosynovial, principalement de type ATTR. Parmi ces 14 patients, un seul patient avait une atteinte cardiaque au moment de la chirurgie. La réalisation de ces biopsies chez les patients les plus à risque d’amylose pourrait permettre un diagnostic plus précoce d’une atteinte cardiaque et un meilleur pronostic grâce à l’initiation d’un traitement au moment opportun.