"Nam erit haec quoque laus eorum": Imitation, Competition and the "L'homme arme" Tradition

Abstract

Depuis la parution de l'article clef de Howard Mayer Brown, « Emulation, Competition and Homage: Imitation and Theories of Imitation in the Renaissance », la notion d'imitation rhetorique a joue un role considerable dans l'explication des strategies compositionnelles de la Renaissance. Cependant, l'introduction de ce terme avant tout litteraire dans l'histoire de la musique a pose tant de problemes aux yeux des commentateurs les plus recents que ces derniers ont parfois nie son utilite, voire sa pertinence. Apres avoir examine ces critiques, nous avons tente d'etablir que l'imitatio peut etre retenu comme concept operatoire pour comprendre la musique de cette epoque a condition que l'on tienne compte des acceptions de ce terme, des objectifs et des fonctions de l'imitation, enfin des differents niveaux auxquelles elle est susceptible de s'exercer. Les nombreuses messes sur le timbre de « L'homme arme » composees durant plus d'un siecle illustrent precisement le concept d'imitation « eristique », a savoir celui d'une imitatio soutenue par le desir d'atteindre la renommee et la fortune en surpassant ses maitres. Cette pensee humaniste est a l'oeuvre dans les liens qui unissent les premiers compositeurs de ces messes ainsi qu'en temoignent les strategies developpees par les uns ou les autres pour surpasser leurs predecesseurs. Le processus atteint son point culminant avec la messe de « L'homme arme » de Josquin. Le reve de Josquin d'atteindre d'une gloire posthume s'est accompli : il devint la figure centrale a partir de laquelle la tradition « L'homme arme » rayonna tout au long du XVI e siecle. La predominance de Josquin sur la generation suivante est due en grande partie au succes du defi lance par « L'homme arme ».