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Abstract
« Il n’y a pas de langue pour dire cela » (« L’outrage aux mots », dans L’outrage aux mots. Oeuvres II), ecrit Bernard Noel a propos des atrocites qui se succedent sans cesse depuis son enfance : repressions, terreurs, dictatures ; guerres, deportations, genocides. Cris d’une femme violee, hurlements de tortures, râles d’une vieille qu’on matraque : il est des horreurs qui mettent en echec la parole et nous ramenent a l’inarticule – grognements, bruits, silences. Cependant, quand Noel parle du manque de langue, il ne renvoie pas seulement a l’indicible, il designe aussi un probleme inherent aux rapports entre pouvoir, societe et langage : « Il n’y a pas de langue parce que nous vivons dans un monde bourgeois, ou le vocabulaire de l’indignation est exclusivement moral – or, c’est cette morale-la qui massacre et qui fait la guerre. Comment retourner sa langue contre elle-meme quand on se retrouve censure par sa propre langue ? » Realiser ce retournement est un objectif fondamental pour l’ecrivain, qui souhaite resister aux effets du pouvoir sur la langue, effets qu’il appelle « sensure ». Cet article traite cette question en l’abordant sous l’angle de l’articulation, lie a une critique du signe et du realisme. Apres avoir fait un retour sur la reflexion que Noel consacre a la sensure et a l’articulation, j’essaierai de voir comment sa poesie, en particulier Bruits de langue, tente de resister au devoiement du langage en decrassant, revivifiant et reinventant diverses articulations langagieres, de la phonetique a la syntaxe, en passant par le mot, le vers, la strophe, etc.
期刊介绍:
Founded in 1965, Études françaises is a French-language journal of criticism and theory. It examines French-language literature and the relationships between the arts and the human sciences, discourse and writing. Each issue concentrates on a specific theme and presents diverse studies. While aimed particularly at specialists of French and Québécois literature, Études françaises addresses anyone with an interest in literature.