{"title":"生病的法国和它的故事","authors":"Alex Gagnon","doi":"10.7202/1059372AR","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Dans l’imaginaire social français du xxie siècle naissant, l’islam devient, selon Raphaël Liogier, « la figure centrale de l’altérité indésirable ». Intrusive, sa présence est souvent considérée comme doublement menaçante, sur les plans sécuritaire et identitaire. Le phénomène n’est pas nouveau, mais il connaît, depuis le milieu des années 2000, une aggravation inédite, alors que les thèmes de l’« islamisation » de la société et de la « radicalisation » des individus alimentent de nouvelles peurs et nourrissent un récit sociétal, celui d’une invasion étrangère qui marquerait le déclin possible d’un Occident menacé. Dans la foulée, on voit apparaître, depuis quelques années, des fictions romanesques qui, s’appropriant ces thèmes, interagissent directement avec ce récit, dans une double dynamique de reprise et de rupture narratives. À partir d’une lecture du discours médiatique visant, dans un premier temps, à reconstruire ce récit sociétal de l’invasion musulmane, cet article analyse, dans un deuxième temps, cinq romans qui, parus en France entre 2012 et 2016, mettent en récit l’islamisation de la société occidentale et/ou la radicalisation ou « djihadisation » d’un personnage converti à l’islam. Il retrace ainsi divers types de transformation que la littérature contemporaine fait subir au récit sociétal : alors que certains textes s’approprient le récit d’invasion pour l’exacerber, racontant ou bien la résistance héroïque d’une Civilisation indestructible ou bien, au contraire, la déliquescence inéluctable d’une France agonisante, d’autres le mettent à distance et, en insistant sur le naufrage d’un Occident délétère, rattachent moins la barbarie à une invasion étrangère qu’à une détérioration intérieure.","PeriodicalId":42726,"journal":{"name":"ETUDES FRANCAISES","volume":"1 1","pages":""},"PeriodicalIF":0.1000,"publicationDate":"2019-05-02","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"La France malade et ses récits\",\"authors\":\"Alex Gagnon\",\"doi\":\"10.7202/1059372AR\",\"DOIUrl\":null,\"url\":null,\"abstract\":\"Dans l’imaginaire social français du xxie siècle naissant, l’islam devient, selon Raphaël Liogier, « la figure centrale de l’altérité indésirable ». 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Dans l’imaginaire social français du xxie siècle naissant, l’islam devient, selon Raphaël Liogier, « la figure centrale de l’altérité indésirable ». Intrusive, sa présence est souvent considérée comme doublement menaçante, sur les plans sécuritaire et identitaire. Le phénomène n’est pas nouveau, mais il connaît, depuis le milieu des années 2000, une aggravation inédite, alors que les thèmes de l’« islamisation » de la société et de la « radicalisation » des individus alimentent de nouvelles peurs et nourrissent un récit sociétal, celui d’une invasion étrangère qui marquerait le déclin possible d’un Occident menacé. Dans la foulée, on voit apparaître, depuis quelques années, des fictions romanesques qui, s’appropriant ces thèmes, interagissent directement avec ce récit, dans une double dynamique de reprise et de rupture narratives. À partir d’une lecture du discours médiatique visant, dans un premier temps, à reconstruire ce récit sociétal de l’invasion musulmane, cet article analyse, dans un deuxième temps, cinq romans qui, parus en France entre 2012 et 2016, mettent en récit l’islamisation de la société occidentale et/ou la radicalisation ou « djihadisation » d’un personnage converti à l’islam. Il retrace ainsi divers types de transformation que la littérature contemporaine fait subir au récit sociétal : alors que certains textes s’approprient le récit d’invasion pour l’exacerber, racontant ou bien la résistance héroïque d’une Civilisation indestructible ou bien, au contraire, la déliquescence inéluctable d’une France agonisante, d’autres le mettent à distance et, en insistant sur le naufrage d’un Occident délétère, rattachent moins la barbarie à une invasion étrangère qu’à une détérioration intérieure.
期刊介绍:
Founded in 1965, Études françaises is a French-language journal of criticism and theory. It examines French-language literature and the relationships between the arts and the human sciences, discourse and writing. Each issue concentrates on a specific theme and presents diverse studies. While aimed particularly at specialists of French and Québécois literature, Études françaises addresses anyone with an interest in literature.