Introduction: Marguerite de Navarre: perspectives croisées. Numéro spécial dédié à la mémoire de Robert D. Cottrell

Abstract

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• Introduction: Marguerite de Navarre: perspectives croisées. Numéro spécial dédié à la mémoire de Robert D. Cottrell
• Nancy Frelick, Scott Francis, Dariusz Krawczyk, and Dora E. Polachek

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Ce numéro rassemble douze études présentées lors du “Séminaire Marguerite de Navarre” qui eut lieu en ligne entre février et mai 2022. Ce colloque international, lancé à l’occasion du 530^e anniversaire de la naissance de la sœur de François I^er, avait pour but de croiser différentes perspectives de recherche sur la reine et son œuvre, dont l’intérêt ne cesse de croître avec le temps, grâce aux générations de seiziémistes qui ont mis en évidence son rôle crucial dans le monde des lettres de la Renaissance. Malgré le nombre de contributions au domaine par d’éminents chercheurs pendant les dernières décennies, il reste toujours beaucoup à dire sur les études margaritiques, y compris la langue et le style, la poétique et la rhétorique, la pensée religieuse et la spiritualité, l’influence et le rayonnement, sans perdre de vue les dimensions historique et culturelle de l’action de celle qui était en son temps nommée la “perle des Valois.”

Les articles réunis ici empruntent différentes voies critiques pour examiner les œuvres de la reine et pour rendre hommage à la mémoire de Robert D. Cottrell (1930–2021), auquel les études margaritiques doivent tant. Dans le premier article, Nancy Frelick se penche sur les contributions de Bob Cottrell en analysant diverses approches psychanalytiques aux œuvres spirituelles et profanes de Marguerite de Navarre. Elle souligne le fait que, pour le chercheur américain, la lecture psychanalytique ne s’avère jamais biographique ou personnelle, mais plutôt textuelle, signalant les aspects rhétoriques et structurels des écrits de la reine, comme l’emploi de l’anaphore et du chiasme dans ses poèmes spéculaires dévots, Le Miroir de l’âme pécheresse et le Miroir de Jhesus Christ crucifié. De plus, les théories lacaniennes dont se sert R. Cottrell pour évoquer le désir d’accéder au divin dans la poésie religieuse de Marguerite [End Page v] confortent l’inspiration tant spirituelle qu’éthique de toutes les œuvres de la sœur de François I^er.

Le deuxième article, par Isabelle Garnier, se voue au rapport entre la correspondance (de 1521 à 1524) de Marguerite d’Angoulême, duchesse d’Alençon (la future reine de Navarre) et de son conseiller spirituel, Guillaume Briçonnet, et la première œuvre poétique importante de l’autrice, le Dialogue en forme de vision nocturne, qui daterait de 1524. Entre autres, Isabelle Garnier met en évidence le rôle de relais que jouent les lettres de la duchesse dans sa saisie de l’enseignement de l’évêque de Meaux, ainsi que la reprise dans le Dialogue de certaines images, locutions et métaphores qui se trouvent dans ses propres missives. En particulier, elle analyse l’expression “trop pis que morte,” dont la répétition indiquerait un mouvement du charnel vers le spirituel dans ce Dialogue funèbre (sans doute rédigé peu après la mort de sa nièce Charlotte), laissant entrevoir l’aspiration paulinienne qui traverse tous les écrits de Marguerite.

Isabelle Pantin, pour sa part, se penche sur la dernière œuvre de la reine, le Miroir de Jésus Christ crucifié, dont elle est en train de terminer l’édition critique sur laquelle elle a longuement travaillé avec Nicole Cazauran, à qui elle dédie son étude. Ce poème dévotionnel, associé aux pratiques de la prière et des exercices spirituels et visant à la transformation intérieure, est empreint d’une forte intertextualité que l’éditrice se charge d’examiner en explorant les sources d’inspiration du texte ainsi que sa fonction performative. Ainsi, Isabelle Pantin souligne l’importance de la fonction spéculaire du poème, qui sert non seulement d’imitatio Christi, mais qui doit surtout préparer l’âme à l’expérience mystique à travers la contemplation de la Passion du Christ, qui lui...