{"title":"Combinaison de la toxicologie médico-légale aux analyses biochimiques post-mortem dans les décès impliquant la metformine","authors":"Antoine Baudriller","doi":"10.1016/j.toxac.2024.09.006","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><div>La metformine est le médicament le plus couramment utilisé dans le traitement du diabète de type 2. Bien qu’elle soit généralement bien tolérée et relativement sûre, la metformine peut entraîner des effets secondaires graves, comme l’acidose lactique (AL), et des cas d’intoxication ont été signalés. Classiquement, la gravité des intoxications à la metformine est mieux évaluée en mesurant la concentration sanguine de lactate et/ou le pH sanguin qu’en déterminant directement la concentration sanguine du médicament. Cependant, une telle approche est plus compliquée dans le cadre d’une investigation post-mortem. Dans ce contexte, nous rapportons un cas de décès en lien avec la metformine.</div></div><div><h3>Méthode</h3><div>Les investigations ont débuté par une autopsie sur un homme de 70<!--> <!-->ans, atteint d’un diabète de type 2, décédé après une hospitalisation pour infection articulaire prothétique. L’autopsie a révélé : une congestion multiviscérale, un œdème pulmonaire, un kyste thyroïdien et un foie stéatosique. De plus, un liquide noirâtre a été retrouvé dans la cavité buccale, les fosses nasales, l’œsophage et l’estomac. De même, les urines avaient une couleur particulièrement foncée. Des échantillons biologiques post-mortem ont été prélevés, y compris du sang cardiaque (SC), du sang fémoral (SF), de l’urine, de l’humeur vitrée et du contenu gastrique. Des analyses toxicologiques ont été effectuées, incluant la quantification de la metformine à l’aide d’une méthode chromatographique liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS/MS). Parallèlement, des analyses biochimiques post-mortem ont été réalisées pour mesurer les concentrations de divers marqueurs métaboliques dans l’humeur vitrée et le SF.</div></div><div><h3>Résultats</h3><div>Les analyses toxicologiques ont retrouvé de la metformine dans toutes les matrices : 45<!--> <!-->mg/L dans le SF, 39<!--> <!-->mg/L dans le SC, 464<!--> <!-->mg/L dans l’urine, 18<!--> <!-->mg/L dans l’humeur vitrée et 202 mg/L dans le contenu gastrique. Les analyses biochimiques réalisées sur l’humeur vitrée ont déterminé des concentrations de sodium (122 mmol/L), de chlorure (102 mmol/L), de glucose (<<!--> <!-->0,10 mmol/L), de créatinine (277<!--> <!-->μmol/L) et de lactate (13 mmol/L). Le β-hydroxybutyrate (BHB) a également été quantifié dans le SF (491<!--> <!-->mg/L) et l’humeur vitrée (473<!--> <!-->mg/L). Enfin, l’hémoglobine glyquée (HbA1C) a été mesurée dans le foie (7,7 %).</div></div><div><h3>Discussion/Conclusion</h3><div>L’interprétation des concentrations post-mortem de metformine est complexe. Seuls quelques cas de décès liés à la metformine ont été décrits. Ces derniers peuvent résulter d’un surdosage en metformine et/ou d’un défaut d’élimination de cette dernière. L’évaluation de la gravité de l’intoxication se fait habituellement par la mesure des concentrations de lactate et du pH sanguin, ce qui est compliqué en post-mortem en raison des altérations biochimiques post-mortem, notamment l’augmentation du lactate et la diminution du pH. Ici, la concentration de metformine SF est apparue particulièrement élevée, en accord avec d’autres cas rapportés. Pour autant, la faible concentration déterminée dans le liquide gastrique n’est pas en faveur d’une ingestion massive de metformine. Par conséquent, dans ce cas, un défaut d’élimination de la metformine ayant conduit à son accumulation et à une AL fatale est suspecté. Les analyses biochimiques post-mortem étaient également cohérentes avec ceux rapportés dans d’autres cas d’accidents mortels liés à la metformine. Il est intéressant de noter que les concentrations de BHB étaient notablement élevées dans le SP et l’humeur vitrée. En outre, la créatinine a été déterminée dans l’humeur vitrée à une concentration particulièrement élevée, suggérant une insuffisance rénale. Ce cas souligne la nécessité d’intégrer des analyses biochimiques et toxicologiques post-mortem dans les décès impliquant la metformine.</div></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 4","pages":"Page 312"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-11-16","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Toxicologie Analytique et Clinique","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352007824002567","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"TOXICOLOGY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Objectif
La metformine est le médicament le plus couramment utilisé dans le traitement du diabète de type 2. Bien qu’elle soit généralement bien tolérée et relativement sûre, la metformine peut entraîner des effets secondaires graves, comme l’acidose lactique (AL), et des cas d’intoxication ont été signalés. Classiquement, la gravité des intoxications à la metformine est mieux évaluée en mesurant la concentration sanguine de lactate et/ou le pH sanguin qu’en déterminant directement la concentration sanguine du médicament. Cependant, une telle approche est plus compliquée dans le cadre d’une investigation post-mortem. Dans ce contexte, nous rapportons un cas de décès en lien avec la metformine.
Méthode
Les investigations ont débuté par une autopsie sur un homme de 70 ans, atteint d’un diabète de type 2, décédé après une hospitalisation pour infection articulaire prothétique. L’autopsie a révélé : une congestion multiviscérale, un œdème pulmonaire, un kyste thyroïdien et un foie stéatosique. De plus, un liquide noirâtre a été retrouvé dans la cavité buccale, les fosses nasales, l’œsophage et l’estomac. De même, les urines avaient une couleur particulièrement foncée. Des échantillons biologiques post-mortem ont été prélevés, y compris du sang cardiaque (SC), du sang fémoral (SF), de l’urine, de l’humeur vitrée et du contenu gastrique. Des analyses toxicologiques ont été effectuées, incluant la quantification de la metformine à l’aide d’une méthode chromatographique liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS/MS). Parallèlement, des analyses biochimiques post-mortem ont été réalisées pour mesurer les concentrations de divers marqueurs métaboliques dans l’humeur vitrée et le SF.
Résultats
Les analyses toxicologiques ont retrouvé de la metformine dans toutes les matrices : 45 mg/L dans le SF, 39 mg/L dans le SC, 464 mg/L dans l’urine, 18 mg/L dans l’humeur vitrée et 202 mg/L dans le contenu gastrique. Les analyses biochimiques réalisées sur l’humeur vitrée ont déterminé des concentrations de sodium (122 mmol/L), de chlorure (102 mmol/L), de glucose (< 0,10 mmol/L), de créatinine (277 μmol/L) et de lactate (13 mmol/L). Le β-hydroxybutyrate (BHB) a également été quantifié dans le SF (491 mg/L) et l’humeur vitrée (473 mg/L). Enfin, l’hémoglobine glyquée (HbA1C) a été mesurée dans le foie (7,7 %).
Discussion/Conclusion
L’interprétation des concentrations post-mortem de metformine est complexe. Seuls quelques cas de décès liés à la metformine ont été décrits. Ces derniers peuvent résulter d’un surdosage en metformine et/ou d’un défaut d’élimination de cette dernière. L’évaluation de la gravité de l’intoxication se fait habituellement par la mesure des concentrations de lactate et du pH sanguin, ce qui est compliqué en post-mortem en raison des altérations biochimiques post-mortem, notamment l’augmentation du lactate et la diminution du pH. Ici, la concentration de metformine SF est apparue particulièrement élevée, en accord avec d’autres cas rapportés. Pour autant, la faible concentration déterminée dans le liquide gastrique n’est pas en faveur d’une ingestion massive de metformine. Par conséquent, dans ce cas, un défaut d’élimination de la metformine ayant conduit à son accumulation et à une AL fatale est suspecté. Les analyses biochimiques post-mortem étaient également cohérentes avec ceux rapportés dans d’autres cas d’accidents mortels liés à la metformine. Il est intéressant de noter que les concentrations de BHB étaient notablement élevées dans le SP et l’humeur vitrée. En outre, la créatinine a été déterminée dans l’humeur vitrée à une concentration particulièrement élevée, suggérant une insuffisance rénale. Ce cas souligne la nécessité d’intégrer des analyses biochimiques et toxicologiques post-mortem dans les décès impliquant la metformine.