{"title":"Raconter sa mort, puis la vivre : « autobiographie irrationnelle » chez João Guimarães Rosa","authors":"Marcelo Marinho","doi":"10.7202/1061863AR","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Guimaraes Rosa qualifie d’« autobiographie irrationnelle » son roman Grande Sertao : Veredas (1956) – le heros Riobaldo est un barde/poete qui se soumet a un pacte faustien pour prendre le dessus sur Hermogene (le signe arbitraire) et recevoir enfin Otacilia (le prix litteraire) ; toutefois, cela se conclut au prix de la perte de Diadorim (Deodoron, cadeau de Dieu : l’âme). Parallelement, dans un registre poetique proche de l’oraliture holographique, Guimaraes Rosa affirme avoir ecrit son chef-d’oeuvre en etat de possession. Et alors qu’il ajourne, par superstition avouee et revendiquee, son entree a l’Academie bresilienne des lettres pendant quatre ans, il meurt mysterieusement trois jours apres la ceremonie. Enigme ou mise en scene ? Par le biais d’indices factuels plantes avec soin sur les sentiers interpretatifs, et suivant a la ligne un scenario tout a fait inedit dans l’histoire universelle de la litterature, le romancier compose en menus details une autobiographie irreductible a une version qui serait definitivement encadree par l’impression graphique : cette autobiographie ne se concoit que dans l’espace poetique de l’oraliture (dans ses manifestations sociales collectives et gregaires, au-dela de l’univers de la lettre imprimee). Dans le but de transformer en legende vivante sa propre existence et afin de se soustraire a l’incompletude hasardeuse de la condition humaine (ainsi qu’aux limitations reductrices qui marquent l’avenement du texte ecrit), Rosa raconte une vie (la sienne), sous pretexte d’une « mort annoncee », par l’intermediaire d’une textualite qui s’accomplit exclusivement dans l’imaginaire de ses lecteurs.","PeriodicalId":42253,"journal":{"name":"ETUDES LITTERAIRES","volume":null,"pages":null},"PeriodicalIF":0.1000,"publicationDate":"2019-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"1","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"ETUDES LITTERAIRES","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.7202/1061863AR","RegionNum":4,"RegionCategory":"文学","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"0","JCRName":"LITERATURE, ROMANCE","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Guimaraes Rosa qualifie d’« autobiographie irrationnelle » son roman Grande Sertao : Veredas (1956) – le heros Riobaldo est un barde/poete qui se soumet a un pacte faustien pour prendre le dessus sur Hermogene (le signe arbitraire) et recevoir enfin Otacilia (le prix litteraire) ; toutefois, cela se conclut au prix de la perte de Diadorim (Deodoron, cadeau de Dieu : l’âme). Parallelement, dans un registre poetique proche de l’oraliture holographique, Guimaraes Rosa affirme avoir ecrit son chef-d’oeuvre en etat de possession. Et alors qu’il ajourne, par superstition avouee et revendiquee, son entree a l’Academie bresilienne des lettres pendant quatre ans, il meurt mysterieusement trois jours apres la ceremonie. Enigme ou mise en scene ? Par le biais d’indices factuels plantes avec soin sur les sentiers interpretatifs, et suivant a la ligne un scenario tout a fait inedit dans l’histoire universelle de la litterature, le romancier compose en menus details une autobiographie irreductible a une version qui serait definitivement encadree par l’impression graphique : cette autobiographie ne se concoit que dans l’espace poetique de l’oraliture (dans ses manifestations sociales collectives et gregaires, au-dela de l’univers de la lettre imprimee). Dans le but de transformer en legende vivante sa propre existence et afin de se soustraire a l’incompletude hasardeuse de la condition humaine (ainsi qu’aux limitations reductrices qui marquent l’avenement du texte ecrit), Rosa raconte une vie (la sienne), sous pretexte d’une « mort annoncee », par l’intermediaire d’une textualite qui s’accomplit exclusivement dans l’imaginaire de ses lecteurs.