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L’objectif de ce papier consiste à démontrer comment le passé colonial anglais, français, allemand et surtout le moment capital de la réunification des deux Cameroun sont «incorporés au présent sans distance» (Dosse, 2000: 182) pour emprunter une expression de François Dosse afin de servir de discours de légitimation à l’une ou l’autre des parties en conflit. Ce faisant, ce travail interroge d’abord l’écriture de cette histoire aussi bien dans le site de production que chez les personnes habilitées à le faire. Nous voulons avant tout ici analyser de manière critique la façon dont les questions de l’indépendance, de la réunification, de l’État fédéral sont traitées par les historiens et les différentes personnes qui se sont penchées sur ces sujets. Quelles lectures les différents auteurs et acteurs de la scène politique camerounaise font-ils de cette histoire et quels sont les problèmes soulevés par tous ces écrits? Aujourd’hui, le retour en force des identités particulières (Southern Cameroons, anglophonie, SCNC...), que semblait avoir tranché le vote référendaire du 11 février 1961 impose de reconsidérer les significations de ce combat, de réétudier les assises et les logiques des acteurs et de ré-analyser avec un œil critique sur ce passé qui refuse de passer et sur le processus par lequel nous sommes arrivés à cette sorte de saturation mémorielle.","PeriodicalId":34840,"journal":{"name":"Africana Studia","volume":"2014 1","pages":""},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2020-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"Problème anglophone et conflits mémoriels au Cameroun\",\"authors\":\"Emmanuel Tchumtchoua\",\"doi\":\"10.21747/DOI.ORG/0874-2375/AFR33A8\",\"DOIUrl\":null,\"url\":null,\"abstract\":\"Parlant de la mémoire collective, Maurice Halbwachs dit qu’elle «est la reconstitution du passé... 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Problème anglophone et conflits mémoriels au Cameroun
Parlant de la mémoire collective, Maurice Halbwachs dit qu’elle «est la reconstitution du passé... Elle adopte l’image des faits anciens aux croyances et aux besoins spirituels du présent» (Halbwachs, 1941: 7). Au-delà du conflit armé, le problème politique, économique et culturel des deux régions anglophones se cristallise autour des enjeux mémoriels qui fondent les discours et les revendications des protagonistes et par lesquels, ces différents acteurs réactualisent et réinterprètent le présent à l’aune d’un passé «essentiellement mythique, déformé, anachronique» (Le Goff, 1988: 194). Ce travail de réinterprétation du passé constitue selon nous l’un des soubassements de la mémoire collective au Cameroun aujourd’hui pour ce qui est du problème anglophone. L’objectif de ce papier consiste à démontrer comment le passé colonial anglais, français, allemand et surtout le moment capital de la réunification des deux Cameroun sont «incorporés au présent sans distance» (Dosse, 2000: 182) pour emprunter une expression de François Dosse afin de servir de discours de légitimation à l’une ou l’autre des parties en conflit. Ce faisant, ce travail interroge d’abord l’écriture de cette histoire aussi bien dans le site de production que chez les personnes habilitées à le faire. Nous voulons avant tout ici analyser de manière critique la façon dont les questions de l’indépendance, de la réunification, de l’État fédéral sont traitées par les historiens et les différentes personnes qui se sont penchées sur ces sujets. Quelles lectures les différents auteurs et acteurs de la scène politique camerounaise font-ils de cette histoire et quels sont les problèmes soulevés par tous ces écrits? Aujourd’hui, le retour en force des identités particulières (Southern Cameroons, anglophonie, SCNC...), que semblait avoir tranché le vote référendaire du 11 février 1961 impose de reconsidérer les significations de ce combat, de réétudier les assises et les logiques des acteurs et de ré-analyser avec un œil critique sur ce passé qui refuse de passer et sur le processus par lequel nous sommes arrivés à cette sorte de saturation mémorielle.