M. Cellier , A. Legendre , M. Babin , G. Le Roux , A. Baudriller
{"title":"Intérêt du suivi toxicocinétique et du génotypage : à propos d’un cas de surdosage subaigu par voriconazole per os","authors":"M. Cellier , A. Legendre , M. Babin , G. Le Roux , A. Baudriller","doi":"10.1016/j.toxac.2024.08.046","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><p>D’après son résumé des caractéristiques du produit, le voriconazole (VRZ) possède un métabolisme hépatique par les cytochromes 2C19, 2C9, 3A4, une cinétique d’élimination non linéaire et un phénomène d’accumulation hépatique. L’objectif de ce cas rapporté est de décrire l’intérêt d’un suivi toxicocinétique et d’un génotypage dans le cas d’un surdosage en VRZ.</p></div><div><h3>Historique du cas</h3><p>Il s’agit d’une patiente de 69<!--> <!-->ans qui était sous voriconazole IV pendant 10j puis per os (PO) à 300<!--> <!-->mg deux fois par jour pendant 3j dans le cadre d’une aspergillose invasive. À J3 du début de la prise PO, le VRZ a été arrêté car la voriconazolémie était en concentration toxique à 8,8 (normes : 1–5,5) mg/L, et que la patiente a présenté une dégradation respiratoire nécessitant un transfert en réanimation avec ventilation assistée ainsi qu’une cytolyse hépatique à 2 fois la normale. La survenue d’une fibrillation atriale a nécessité l’administration d’amiodarone IV. À J4, la voriconazolémie a atteint un pic maximal à 9,5<!--> <!-->mg/L et n’est redevenue normale à 4,37<!--> <!-->mg/L qu’à partir de J8. Un génotypage a également été réalisé sur le CYP2C19 de la patiente rendant un phénotype proche d’un métaboliseur normal.</p></div><div><h3>Discussion</h3><p>Les signes présentés par la patiente sont décrits dans la littérature en cas de surdosage en VRZ avec principalement une majoration des effets indésirables tel qu’une détresse respiratoire, une atteinte hépatique et une arythmie <span><span>[1]</span></span>. Une telle cinétique inhabituellement allongée malgré un arrêt du VRZ peut s’expliquer par la cinétique d’élimination non linéaire du VRZ due à la saturation de son métabolisme hépatique des suites d’un surdosage sur 3<!--> <!-->jours, une interaction médicamenteuse avec l’amiodarone (inhibiteur PGP, 3A4 et 2C19), une atteinte hépatique (présence d’une légère cytolyse hépatique) et un syndrome inflammatoire (CRP max<!--> <!-->=<!--> <!-->354<!--> <!-->mg/L). Le génotypage réalisé a permis de confirmer l’absence d’un statut métaboliseur lent du CYP2C19. L’hypothèse d’un phénomène de phénoconversion des CYP450 via un syndrome inflammatoire peut se poser. Les cytokines pro-inflammatoires (IL1, IL6, TNFa) sont connues pour inhiber l’activité des CYP450 <span><span>[2]</span></span>. Des études ont démontré que l’inflammation engendre une augmentation des concentrations de VRZ <span><span>[3]</span></span>. D’autres études ont même proposé des équations reliant la CRP avec la voriconazolémie <span><span>[3]</span></span>. Chez notre patiente, une seule CRP a été mesurée mais jamais de pair avec les concentrations de VRZ.</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>Dans le cas d’un suivi toxicocinétique suite à une cinétique inhabituellement allongée en VRZ, il semblerait plus pertinent de faire un suivi cinétique du VRZ couplé à la CRP car les résultats de génotypage sont longs (environ 1 mois). Les cliniciens doivent prendre en compte l’impact de l’inflammation lors de cinétique inhabituellement allongée de certaines molécules.</p></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 3","pages":"Page S97"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-09-10","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Toxicologie Analytique et Clinique","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352007824002075","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"TOXICOLOGY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Objectif
D’après son résumé des caractéristiques du produit, le voriconazole (VRZ) possède un métabolisme hépatique par les cytochromes 2C19, 2C9, 3A4, une cinétique d’élimination non linéaire et un phénomène d’accumulation hépatique. L’objectif de ce cas rapporté est de décrire l’intérêt d’un suivi toxicocinétique et d’un génotypage dans le cas d’un surdosage en VRZ.
Historique du cas
Il s’agit d’une patiente de 69 ans qui était sous voriconazole IV pendant 10j puis per os (PO) à 300 mg deux fois par jour pendant 3j dans le cadre d’une aspergillose invasive. À J3 du début de la prise PO, le VRZ a été arrêté car la voriconazolémie était en concentration toxique à 8,8 (normes : 1–5,5) mg/L, et que la patiente a présenté une dégradation respiratoire nécessitant un transfert en réanimation avec ventilation assistée ainsi qu’une cytolyse hépatique à 2 fois la normale. La survenue d’une fibrillation atriale a nécessité l’administration d’amiodarone IV. À J4, la voriconazolémie a atteint un pic maximal à 9,5 mg/L et n’est redevenue normale à 4,37 mg/L qu’à partir de J8. Un génotypage a également été réalisé sur le CYP2C19 de la patiente rendant un phénotype proche d’un métaboliseur normal.
Discussion
Les signes présentés par la patiente sont décrits dans la littérature en cas de surdosage en VRZ avec principalement une majoration des effets indésirables tel qu’une détresse respiratoire, une atteinte hépatique et une arythmie [1]. Une telle cinétique inhabituellement allongée malgré un arrêt du VRZ peut s’expliquer par la cinétique d’élimination non linéaire du VRZ due à la saturation de son métabolisme hépatique des suites d’un surdosage sur 3 jours, une interaction médicamenteuse avec l’amiodarone (inhibiteur PGP, 3A4 et 2C19), une atteinte hépatique (présence d’une légère cytolyse hépatique) et un syndrome inflammatoire (CRP max = 354 mg/L). Le génotypage réalisé a permis de confirmer l’absence d’un statut métaboliseur lent du CYP2C19. L’hypothèse d’un phénomène de phénoconversion des CYP450 via un syndrome inflammatoire peut se poser. Les cytokines pro-inflammatoires (IL1, IL6, TNFa) sont connues pour inhiber l’activité des CYP450 [2]. Des études ont démontré que l’inflammation engendre une augmentation des concentrations de VRZ [3]. D’autres études ont même proposé des équations reliant la CRP avec la voriconazolémie [3]. Chez notre patiente, une seule CRP a été mesurée mais jamais de pair avec les concentrations de VRZ.
Conclusion
Dans le cas d’un suivi toxicocinétique suite à une cinétique inhabituellement allongée en VRZ, il semblerait plus pertinent de faire un suivi cinétique du VRZ couplé à la CRP car les résultats de génotypage sont longs (environ 1 mois). Les cliniciens doivent prendre en compte l’impact de l’inflammation lors de cinétique inhabituellement allongée de certaines molécules.