M. Labadie , C. Paradis , A. Nardon , C. Tournoud , C. Bragança , R. Garnier
{"title":"Prise en charge de patients résidant sur un sol pollué par le cadmium, le mercure et le plomb : un exemple français en 2024","authors":"M. Labadie , C. Paradis , A. Nardon , C. Tournoud , C. Bragança , R. Garnier","doi":"10.1016/j.toxac.2024.08.008","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><p>En France, depuis 1990, le ministère de l’Environnement inventorie les sites (potentiellement) pollués. De nombreux sites ayant accueilli par le passé des activités industrielles et minières, se retrouvent à l’état de friches polluées sur lesquelles des habitations ont été construites par la suite. L’objectif est de décrire, à partir d’un exemple, la prise en charge d’une population vivant sur un sol pollué par le cadmium, le mercure et le plomb.</p></div><div><h3>Méthode</h3><p>En novembre 2023, l’Agence régionale de santé (ARS), dans le cadre de la mise en œuvre des mesures de gestion sanitaires (instruction n<sup>o</sup> DGS/EA1/2019/43 du 13 juin 2019), sollicite l’expertise du centre antipoison territorial (CAP) suite à la découverte d’un sol pollué ; elle lui transmet le rapport de l’interprétation de l’état des milieux qui montre une pollution des sols par des éléments traces métalliques (majoritairement cadmium, plomb et mercure). Une population d’environ 300 personnes habite sur ce site. Le CAP ouvre un dossier médical dans le système d’information des CAP, dont l’exploitation est réalisée avec l’accord de la CNIL (n<sup>o</sup> d’accréditation 747735), pour chaque patient acceptant une prise en charge, et notamment la réponse à un questionnaire médical et environnemental précis, ainsi que la réalisation de dosages de métaux dans les matrices biologiques (sang et urine). Le cadmium est recherché dans les urines (cadmiurie) par ICP-MS (LOQ 0,2<!--> <!-->μg/L), le plomb est recherché dans le sang (plombémie) par ICP-MS. Le mercure a été recherché dans les urines (mercuriurie) par absorbtion atomique (LOQ 1<!--> <!-->μg/L) et par ICP-MS (LOQ 0,3<!--> <!-->μg/L).</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>Parmi les riverains, 94 personnes ont accepté au moins un prélèvement, dont 12 ont moins de 18<!--> <!-->ans, et 17 sont des femmes en âge de procréer. L’âge médian est de 64<!--> <!-->ans, le sex-ratio de 0,63. 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L’ARS a donné des informations générales à la population exposée, sur les principes à respecter pour limiter les contaminations, et notamment pour les femmes en âge de procréer. Le CAP a transmis à tous les médecins généralistes (33 médecins) le détail de l’interprétation des analyses pour chacun de leurs patients. 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Abstract
Objectif
En France, depuis 1990, le ministère de l’Environnement inventorie les sites (potentiellement) pollués. De nombreux sites ayant accueilli par le passé des activités industrielles et minières, se retrouvent à l’état de friches polluées sur lesquelles des habitations ont été construites par la suite. L’objectif est de décrire, à partir d’un exemple, la prise en charge d’une population vivant sur un sol pollué par le cadmium, le mercure et le plomb.
Méthode
En novembre 2023, l’Agence régionale de santé (ARS), dans le cadre de la mise en œuvre des mesures de gestion sanitaires (instruction no DGS/EA1/2019/43 du 13 juin 2019), sollicite l’expertise du centre antipoison territorial (CAP) suite à la découverte d’un sol pollué ; elle lui transmet le rapport de l’interprétation de l’état des milieux qui montre une pollution des sols par des éléments traces métalliques (majoritairement cadmium, plomb et mercure). Une population d’environ 300 personnes habite sur ce site. Le CAP ouvre un dossier médical dans le système d’information des CAP, dont l’exploitation est réalisée avec l’accord de la CNIL (no d’accréditation 747735), pour chaque patient acceptant une prise en charge, et notamment la réponse à un questionnaire médical et environnemental précis, ainsi que la réalisation de dosages de métaux dans les matrices biologiques (sang et urine). Le cadmium est recherché dans les urines (cadmiurie) par ICP-MS (LOQ 0,2 μg/L), le plomb est recherché dans le sang (plombémie) par ICP-MS. Le mercure a été recherché dans les urines (mercuriurie) par absorbtion atomique (LOQ 1 μg/L) et par ICP-MS (LOQ 0,3 μg/L).
Résultats
Parmi les riverains, 94 personnes ont accepté au moins un prélèvement, dont 12 ont moins de 18 ans, et 17 sont des femmes en âge de procréer. L’âge médian est de 64 ans, le sex-ratio de 0,63. Quatorze prélèvements ont été réalisés potentiellement l’après-midi, 12 ne mentionnaient pas l’heure. Huit patients avaient une créatinine urinaire inférieure à 0,3 g/L, supérieure à 3 g/L ou inconnue, ne permettant pas une analyse pertinente de leurs résultats. S’agissant du mercure, 87 mercuriuries en absorption atomique et 7 en ICP-MS ont été réalisées. Toutes les valeurs sont inférieures au P95 des valeurs d’imprégnation de la population française adaptées à l’âge (étude Esteban) [1]. S’agissant du cadmium, 93 cadmiuries ont été obtenues, dont 5 étaient supérieures à 1,0 μg/g de créatinine, pour des patients tous âgés de plus de 50 ans. Aucun dépassement n’était observé pour les patients âgés de moins de 30 ans, les 31–40 ans, les 41–50 ans, les valeurs sanitaires de référence ANSES/HBM4EU pour ces classes d’âge étant respectivement de 0,3 μg/g, 0,5 μg/g, 0,8 μg/g. S’agissant du plomb, 93 plombémies ont été obtenues. Sept plombémies dépassent le P95 dans la classe des 18–74 ans (étude Esteban) et une, chez un enfant, dépasse le seuil de surveillance fixé par le Haut Conseil de santé publique fixé à 25 μg/L [2].
Conclusion
Au total, 8 patients doivent refaire leurs analyses, 5 sont surexposés au cadmium, et 8 surexposés au plomb. Les questionnaires remis aux patients doivent être étudiés, pour évaluer les sources de contamination (mode de vie, alimentation de légumes auto-produits, jardinage, exposition professionnelle…) et revoir les analyses en cas d’insuffisance rénale méconnue. L’ARS a donné des informations générales à la population exposée, sur les principes à respecter pour limiter les contaminations, et notamment pour les femmes en âge de procréer. Le CAP a transmis à tous les médecins généralistes (33 médecins) le détail de l’interprétation des analyses pour chacun de leurs patients. Le CAP se rendra sur place dans les semaines à venir pour effectuer, en accord avec les médecins traitants, des consultations auprès des patients surexposés et ceux qui nécessitent une surveillance ciblée, en particulier les enfants.