{"title":"(D)写不可能写:Artaud/ riviere通信","authors":"Stéphane Cermakian","doi":"10.4000/books.pufc.7692","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"La ou d’autres proposent des œuvres je ne pretends pas autre chose que de montrer mon esprit.La vie est de bruler des questions.Je ne concois pas d’œuvre comme detachee de la vie.Je n’aime pas la creation detachee. Je ne concois pas non plus l’esprit comme detache de lui-meme. Chacune de mes œuvres, chacun des plans de moi-meme, chacune des floraisons glacieres de mon âme interieure bave sur moi. (51)1Lorsqu’il publie en juillet 1925 aux Editions de la Nouvelle Revue francaise L’Ombilic des Limbes, qui s’ouvre sur ces mots, Artaud a vingt-huit ans et s’est engage dans un processus d’ecriture qui a deja abouti a la publication en septembre 1924 d’une correspondance avec le directeur de la Nouvelle Revue francaise, Jacques Riviere. Devant son refus initial de publier les poemes d’Artaud, ce dernier avait reclame son « droit a l’existence », ce que Riviere a tout a fait compris ; et Artaud le reclame si bien, en decrivant egalement ce qui l’empeche d’acceder a cette existence, que Riviere realise qu’il est en face d’un cas singulier dans la litterature, et que ce jeune homme qui sait encore si mal organiser son inspiration en poemes aboutis sait par contre admirablement decrire ce qui l’empeche d’enoncer son verbe et de le cristalliser en une œuvre… Jusqu’au moment ou il prendra conscience que leur correspondance est en soi une œuvre et qu’il convient de la publier, ce qu’il proposera a Artaud.La valeur poetique de cette correspondance pose la question du genre, et malgre la gra","PeriodicalId":398913,"journal":{"name":"Les écrivains théoriciens de la littérature (1920-1945)","volume":"33 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2013-05-05","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"(D)écrire l’impossibilité d’écrire : la correspondance Artaud/Rivière\",\"authors\":\"Stéphane Cermakian\",\"doi\":\"10.4000/books.pufc.7692\",\"DOIUrl\":null,\"url\":null,\"abstract\":\"La ou d’autres proposent des œuvres je ne pretends pas autre chose que de montrer mon esprit.La vie est de bruler des questions.Je ne concois pas d’œuvre comme detachee de la vie.Je n’aime pas la creation detachee. Je ne concois pas non plus l’esprit comme detache de lui-meme. Chacune de mes œuvres, chacun des plans de moi-meme, chacune des floraisons glacieres de mon âme interieure bave sur moi. (51)1Lorsqu’il publie en juillet 1925 aux Editions de la Nouvelle Revue francaise L’Ombilic des Limbes, qui s’ouvre sur ces mots, Artaud a vingt-huit ans et s’est engage dans un processus d’ecriture qui a deja abouti a la publication en septembre 1924 d’une correspondance avec le directeur de la Nouvelle Revue francaise, Jacques Riviere. Devant son refus initial de publier les poemes d’Artaud, ce dernier avait reclame son « droit a l’existence », ce que Riviere a tout a fait compris ; et Artaud le reclame si bien, en decrivant egalement ce qui l’empeche d’acceder a cette existence, que Riviere realise qu’il est en face d’un cas singulier dans la litterature, et que ce jeune homme qui sait encore si mal organiser son inspiration en poemes aboutis sait par contre admirablement decrire ce qui l’empeche d’enoncer son verbe et de le cristalliser en une œuvre… Jusqu’au moment ou il prendra conscience que leur correspondance est en soi une œuvre et qu’il convient de la publier, ce qu’il proposera a Artaud.La valeur poetique de cette correspondance pose la question du genre, et malgre la gra\",\"PeriodicalId\":398913,\"journal\":{\"name\":\"Les écrivains théoriciens de la littérature (1920-1945)\",\"volume\":\"33 1\",\"pages\":\"0\"},\"PeriodicalIF\":0.0000,\"publicationDate\":\"2013-05-05\",\"publicationTypes\":\"Journal Article\",\"fieldsOfStudy\":null,\"isOpenAccess\":false,\"openAccessPdf\":\"\",\"citationCount\":\"0\",\"resultStr\":null,\"platform\":\"Semanticscholar\",\"paperid\":null,\"PeriodicalName\":\"Les écrivains théoriciens de la littérature (1920-1945)\",\"FirstCategoryId\":\"1085\",\"ListUrlMain\":\"https://doi.org/10.4000/books.pufc.7692\",\"RegionNum\":0,\"RegionCategory\":null,\"ArticlePicture\":[],\"TitleCN\":null,\"AbstractTextCN\":null,\"PMCID\":null,\"EPubDate\":\"\",\"PubModel\":\"\",\"JCR\":\"\",\"JCRName\":\"\",\"Score\":null,\"Total\":0}","platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Les écrivains théoriciens de la littérature (1920-1945)","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.4000/books.pufc.7692","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"","JCRName":"","Score":null,"Total":0}
(D)écrire l’impossibilité d’écrire : la correspondance Artaud/Rivière
La ou d’autres proposent des œuvres je ne pretends pas autre chose que de montrer mon esprit.La vie est de bruler des questions.Je ne concois pas d’œuvre comme detachee de la vie.Je n’aime pas la creation detachee. Je ne concois pas non plus l’esprit comme detache de lui-meme. Chacune de mes œuvres, chacun des plans de moi-meme, chacune des floraisons glacieres de mon âme interieure bave sur moi. (51)1Lorsqu’il publie en juillet 1925 aux Editions de la Nouvelle Revue francaise L’Ombilic des Limbes, qui s’ouvre sur ces mots, Artaud a vingt-huit ans et s’est engage dans un processus d’ecriture qui a deja abouti a la publication en septembre 1924 d’une correspondance avec le directeur de la Nouvelle Revue francaise, Jacques Riviere. Devant son refus initial de publier les poemes d’Artaud, ce dernier avait reclame son « droit a l’existence », ce que Riviere a tout a fait compris ; et Artaud le reclame si bien, en decrivant egalement ce qui l’empeche d’acceder a cette existence, que Riviere realise qu’il est en face d’un cas singulier dans la litterature, et que ce jeune homme qui sait encore si mal organiser son inspiration en poemes aboutis sait par contre admirablement decrire ce qui l’empeche d’enoncer son verbe et de le cristalliser en une œuvre… Jusqu’au moment ou il prendra conscience que leur correspondance est en soi une œuvre et qu’il convient de la publier, ce qu’il proposera a Artaud.La valeur poetique de cette correspondance pose la question du genre, et malgre la gra