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{"title":"眼É包厢d 'une guerriè.Thérè就是de利雪pat Jean de . Saint-Ché朗(评论)","authors":"Khadija Khalifé","doi":"10.1353/tfr.2023.a911393","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Reviewed by: Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux par Jean de. Saint-Chéron Khadija Khalifé Saint-Chéron, Jean De. Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux. Grasset, 2023. ISBN 978-2-246-83206-5. Pp. 220. On lit en général dans les hagiographies un évènement ou un phénomène majeur qui justifierait chez les saints le basculement d’un mode de vie à un autre—communément l’abandon d’une vie mondaine et la brusque entrée dans le royaume de Dieu. Or, ce n’est pas le cas de Thérèse de Lisieux (1873–1897) dont l’existence, depuis la maison familiale jusqu’au monastère carmélite, fut baignée dans les enseignements de l’Église. Thérèse confirme: “Toute ma vie le bon Dieu s’est plu à m’entourer d’amour” (29). Au premier abord, cette protection divine constante laisserait sous-entendre une sainteté ennuyeuse: “il n’était pas nécessaire de faire des œuvres éclatantes mais de se cacher et de pratiquer la vertu”, écritelle (67). Que cela pourrait paraître dérisoire pour qui a subi les grandes adversités de la vie! Et on ne peut s’empêcher de penser à la tendance opposée, en particulier à celle de Mère Teresa qui a brillé dans des œuvres humanitaires glorieuses. Et pourtant, bien que Thérèse de Lisieux ne fût jamais exposée à des appâts maléfiques (elle a été “épargnée par la tentation du grand péché”, 151), et qu’elle n’ait pas fait de son vivant d’œuvre grandiose auprès des démunis (“elle ne trouve le réconfort que dans la méditation et la lecture”, 64), l’essai que lui consacre Jean de Saint-Chéron souligne ses qualités de “guerrière” (“soldat si vaillant”, “champ de bataille”, mourir “les armes à la main”): “j’ai compris que pour devenir une sainte il fallait beaucoup souffrir, rechercher toujours le plus parfait et s’oublier soi-même” (39). L’enjeu est de taille, et le combat spirituel, nourri par le cloître et l’ascétisme, n’est pas nécessairement acquis. Il faut soulever des montagnes pour parvenir à la pureté originale et à la perfection. Il faut être guidé par le sens du dépouillement et de l’abnégation pour être imprégné d’amour—et devenir amour: “Il faut se vider de soi-même pour se remplir de Dieu. Mourir pour ressusciter. Vivre pour les autres” (127). En fin de compte, sainte Thérèse de Lisieux fait exactement comme sainte Teresa de Calcutta—à savoir “Vivre pour les autres”—mais moyennant d’autres voies (que dans des “œuvres éclatantes”). En effet, elle est parvenue, par le pouvoir de ses prières, à convertir à distance Pranzini, un certain condamné à mort jusque-là impénitent. L’amour absolu de Thérèse a fait des miracles, et on sait bien la place privilégiée qu’occupait cette sainte dans le cœur d’Édith Piaf dont elle a guéri la cécité. La vertu suprême de Thérèse de Lisieux serait donc de parvenir à s’unir à Dieu, et “aimer comme Dieu aime” (70–71). L’essai de Jean de Saint-Chéron a le mérite d’apporter un éclairage direct aux états d’âme de sainte Thérèse en se référant constamment aux écrits intimes de sa protagoniste (manuscrits, entretiens et correspondance) avec une vingtaine de pages de notes infrapaginales. Plonger dans le tréfonds de son âme est un vecteur indispensable à l’examen de son expérience mystique pour atteindre l’équilibre intérieur et, partant (dans le contexte religieux), la grâce divine. [End Page 226] Khadija Khalifé Independent Scholar Copyright © 2023 American Association of Teachers of French","PeriodicalId":44297,"journal":{"name":"FRENCH REVIEW","volume":"21 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.1000,"publicationDate":"2023-10-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux par Jean de. Saint-Chéron (review)\",\"authors\":\"Khadija Khalifé\",\"doi\":\"10.1353/tfr.2023.a911393\",\"DOIUrl\":null,\"url\":null,\"abstract\":\"Reviewed by: Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux par Jean de. Saint-Chéron Khadija Khalifé Saint-Chéron, Jean De. Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux. Grasset, 2023. ISBN 978-2-246-83206-5. Pp. 220. 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Vivre pour les autres” (127). En fin de compte, sainte Thérèse de Lisieux fait exactement comme sainte Teresa de Calcutta—à savoir “Vivre pour les autres”—mais moyennant d’autres voies (que dans des “œuvres éclatantes”). En effet, elle est parvenue, par le pouvoir de ses prières, à convertir à distance Pranzini, un certain condamné à mort jusque-là impénitent. L’amour absolu de Thérèse a fait des miracles, et on sait bien la place privilégiée qu’occupait cette sainte dans le cœur d’Édith Piaf dont elle a guéri la cécité. La vertu suprême de Thérèse de Lisieux serait donc de parvenir à s’unir à Dieu, et “aimer comme Dieu aime” (70–71). L’essai de Jean de Saint-Chéron a le mérite d’apporter un éclairage direct aux états d’âme de sainte Thérèse en se référant constamment aux écrits intimes de sa protagoniste (manuscrits, entretiens et correspondance) avec une vingtaine de pages de notes infrapaginales. 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Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux par Jean de. Saint-Chéron (review)
Reviewed by: Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux par Jean de. Saint-Chéron Khadija Khalifé Saint-Chéron, Jean De. Éloge d’une guerrière. Thérèse de Lisieux. Grasset, 2023. ISBN 978-2-246-83206-5. Pp. 220. On lit en général dans les hagiographies un évènement ou un phénomène majeur qui justifierait chez les saints le basculement d’un mode de vie à un autre—communément l’abandon d’une vie mondaine et la brusque entrée dans le royaume de Dieu. Or, ce n’est pas le cas de Thérèse de Lisieux (1873–1897) dont l’existence, depuis la maison familiale jusqu’au monastère carmélite, fut baignée dans les enseignements de l’Église. Thérèse confirme: “Toute ma vie le bon Dieu s’est plu à m’entourer d’amour” (29). Au premier abord, cette protection divine constante laisserait sous-entendre une sainteté ennuyeuse: “il n’était pas nécessaire de faire des œuvres éclatantes mais de se cacher et de pratiquer la vertu”, écritelle (67). Que cela pourrait paraître dérisoire pour qui a subi les grandes adversités de la vie! Et on ne peut s’empêcher de penser à la tendance opposée, en particulier à celle de Mère Teresa qui a brillé dans des œuvres humanitaires glorieuses. Et pourtant, bien que Thérèse de Lisieux ne fût jamais exposée à des appâts maléfiques (elle a été “épargnée par la tentation du grand péché”, 151), et qu’elle n’ait pas fait de son vivant d’œuvre grandiose auprès des démunis (“elle ne trouve le réconfort que dans la méditation et la lecture”, 64), l’essai que lui consacre Jean de Saint-Chéron souligne ses qualités de “guerrière” (“soldat si vaillant”, “champ de bataille”, mourir “les armes à la main”): “j’ai compris que pour devenir une sainte il fallait beaucoup souffrir, rechercher toujours le plus parfait et s’oublier soi-même” (39). L’enjeu est de taille, et le combat spirituel, nourri par le cloître et l’ascétisme, n’est pas nécessairement acquis. Il faut soulever des montagnes pour parvenir à la pureté originale et à la perfection. Il faut être guidé par le sens du dépouillement et de l’abnégation pour être imprégné d’amour—et devenir amour: “Il faut se vider de soi-même pour se remplir de Dieu. Mourir pour ressusciter. Vivre pour les autres” (127). En fin de compte, sainte Thérèse de Lisieux fait exactement comme sainte Teresa de Calcutta—à savoir “Vivre pour les autres”—mais moyennant d’autres voies (que dans des “œuvres éclatantes”). En effet, elle est parvenue, par le pouvoir de ses prières, à convertir à distance Pranzini, un certain condamné à mort jusque-là impénitent. L’amour absolu de Thérèse a fait des miracles, et on sait bien la place privilégiée qu’occupait cette sainte dans le cœur d’Édith Piaf dont elle a guéri la cécité. La vertu suprême de Thérèse de Lisieux serait donc de parvenir à s’unir à Dieu, et “aimer comme Dieu aime” (70–71). L’essai de Jean de Saint-Chéron a le mérite d’apporter un éclairage direct aux états d’âme de sainte Thérèse en se référant constamment aux écrits intimes de sa protagoniste (manuscrits, entretiens et correspondance) avec une vingtaine de pages de notes infrapaginales. Plonger dans le tréfonds de son âme est un vecteur indispensable à l’examen de son expérience mystique pour atteindre l’équilibre intérieur et, partant (dans le contexte religieux), la grâce divine. [End Page 226] Khadija Khalifé Independent Scholar Copyright © 2023 American Association of Teachers of French