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{"title":"我的双腿无恙","authors":"Mark D. Lee","doi":"10.1353/tfr.2023.a911348","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Reviewed by: L’homme qui danse par Victor Jestin Mark D. Lee Jestin, Victor. L’homme qui danse. Flammarion, 2022. ISBN 978-20802-3920-4. Pp. 192. Ce deuxième roman d’un auteur né en 1994 trace avec économie le parcours d’un jeune solitaire, mal à l’aise dans le monde et dans sa peau. Il s’agit de suivre de ses neuf ans à la fin de la trentaine la vie d’Arthur qui évolue—ou pas—en manque de liens sociaux qui lui échappent. Comme le suggère le titre, le roman prend pour cadre principal l’univers de la danse, spécifiquement une boîte de nuit de province où Arthur va se buter contre, sans jamais vraiment la confronter, sa difficulté à se lier aux autres. Narré à la première personne, ce récit enchâssé se compose de onze chapitres non numérotés lesquels, à l’exception de l’ouverture, portent tous pour titre une date et le prénom—la plupart masculins—des personnes qui ont ponctué l’existence du narrateur entre 1990 et 2019. La constance à travers ces moments sera La Plage, boîte de nuit qu’Arthur connaîtra très jeune, terrorisé par l’injonction de danser et son incapacité à le faire. Au fil des années et des rencontres, il finira par fréquenter, sinon par hanter ce lieu. Car si Arthur apprendra la danse, il n’apprivoisera jamais avec succès une sociabilité qui dure en dehors des confins de cet espace très restreint, presque sans parole où, contrairement à lui, les autres sont de passage. Le roman de Jestin dépeint un monde teinté d’angoisse adolescente. Il est beaucoup question dans les premiers épisodes d’être mal dans la peau d’un jeune, poussé par l’impératif social de connaître la relation sexuelle. Le corps y est toujours jugé déficitaire par rapport aux autres mâles, d’où une préoccupation avec les muscles, la carrure, le physique en général. En effet, la seule autre activité—elle aussi, solitaire—à laquelle s’adonne Arthur est la musculation dans un gymnase où, à force de fréquentation, il deviendra employé. Ainsi, les chapitres racontent-ils principalement une série d’échecs liés à la Plage et à sa faune au cours des années: une collection de prédateurs, narcissiques, rivaux et quelques partenaires romantiques possibles, dont un homme et quelques femmes. Leur rencontre semble parfois prometteuse mais s’avère infailliblement sans lendemain. Menée par la voix du personnage principal, cette narration est ponctuée de dialogues et de descriptions, mais presque jamais de réflexion sur soi. Et voilà l’obstacle. La danse—ce qui devait précisément être le remède à la timidité et à l’image négative de soi—finit par être le poison. La Plage n’est plus un lieu d’épanouissement mais une sorte de prison, le lieu où toutes les autres facettes de la personne sociale arrêtent leur développement, stagnent. Et L’homme qui danse, le tableau de cette solitude en mouvement. [End Page 241] Mark D. Lee Mount Allison University (NB), Canada Copyright © 2023 American Association of Teachers of French","PeriodicalId":44297,"journal":{"name":"FRENCH REVIEW","volume":"40 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.1000,"publicationDate":"2023-10-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"L’homme qui danse par Victor Jestin (review)\",\"authors\":\"Mark D. Lee\",\"doi\":\"10.1353/tfr.2023.a911348\",\"DOIUrl\":null,\"url\":null,\"abstract\":\"Reviewed by: L’homme qui danse par Victor Jestin Mark D. Lee Jestin, Victor. L’homme qui danse. Flammarion, 2022. ISBN 978-20802-3920-4. Pp. 192. 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Au fil des années et des rencontres, il finira par fréquenter, sinon par hanter ce lieu. Car si Arthur apprendra la danse, il n’apprivoisera jamais avec succès une sociabilité qui dure en dehors des confins de cet espace très restreint, presque sans parole où, contrairement à lui, les autres sont de passage. Le roman de Jestin dépeint un monde teinté d’angoisse adolescente. Il est beaucoup question dans les premiers épisodes d’être mal dans la peau d’un jeune, poussé par l’impératif social de connaître la relation sexuelle. Le corps y est toujours jugé déficitaire par rapport aux autres mâles, d’où une préoccupation avec les muscles, la carrure, le physique en général. En effet, la seule autre activité—elle aussi, solitaire—à laquelle s’adonne Arthur est la musculation dans un gymnase où, à force de fréquentation, il deviendra employé. Ainsi, les chapitres racontent-ils principalement une série d’échecs liés à la Plage et à sa faune au cours des années: une collection de prédateurs, narcissiques, rivaux et quelques partenaires romantiques possibles, dont un homme et quelques femmes. Leur rencontre semble parfois prometteuse mais s’avère infailliblement sans lendemain. Menée par la voix du personnage principal, cette narration est ponctuée de dialogues et de descriptions, mais presque jamais de réflexion sur soi. Et voilà l’obstacle. La danse—ce qui devait précisément être le remède à la timidité et à l’image négative de soi—finit par être le poison. La Plage n’est plus un lieu d’épanouissement mais une sorte de prison, le lieu où toutes les autres facettes de la personne sociale arrêtent leur développement, stagnent. Et L’homme qui danse, le tableau de cette solitude en mouvement. [End Page 241] Mark D. 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L’homme qui danse par Victor Jestin (review)
Reviewed by: L’homme qui danse par Victor Jestin Mark D. Lee Jestin, Victor. L’homme qui danse. Flammarion, 2022. ISBN 978-20802-3920-4. Pp. 192. Ce deuxième roman d’un auteur né en 1994 trace avec économie le parcours d’un jeune solitaire, mal à l’aise dans le monde et dans sa peau. Il s’agit de suivre de ses neuf ans à la fin de la trentaine la vie d’Arthur qui évolue—ou pas—en manque de liens sociaux qui lui échappent. Comme le suggère le titre, le roman prend pour cadre principal l’univers de la danse, spécifiquement une boîte de nuit de province où Arthur va se buter contre, sans jamais vraiment la confronter, sa difficulté à se lier aux autres. Narré à la première personne, ce récit enchâssé se compose de onze chapitres non numérotés lesquels, à l’exception de l’ouverture, portent tous pour titre une date et le prénom—la plupart masculins—des personnes qui ont ponctué l’existence du narrateur entre 1990 et 2019. La constance à travers ces moments sera La Plage, boîte de nuit qu’Arthur connaîtra très jeune, terrorisé par l’injonction de danser et son incapacité à le faire. Au fil des années et des rencontres, il finira par fréquenter, sinon par hanter ce lieu. Car si Arthur apprendra la danse, il n’apprivoisera jamais avec succès une sociabilité qui dure en dehors des confins de cet espace très restreint, presque sans parole où, contrairement à lui, les autres sont de passage. Le roman de Jestin dépeint un monde teinté d’angoisse adolescente. Il est beaucoup question dans les premiers épisodes d’être mal dans la peau d’un jeune, poussé par l’impératif social de connaître la relation sexuelle. Le corps y est toujours jugé déficitaire par rapport aux autres mâles, d’où une préoccupation avec les muscles, la carrure, le physique en général. En effet, la seule autre activité—elle aussi, solitaire—à laquelle s’adonne Arthur est la musculation dans un gymnase où, à force de fréquentation, il deviendra employé. Ainsi, les chapitres racontent-ils principalement une série d’échecs liés à la Plage et à sa faune au cours des années: une collection de prédateurs, narcissiques, rivaux et quelques partenaires romantiques possibles, dont un homme et quelques femmes. Leur rencontre semble parfois prometteuse mais s’avère infailliblement sans lendemain. Menée par la voix du personnage principal, cette narration est ponctuée de dialogues et de descriptions, mais presque jamais de réflexion sur soi. Et voilà l’obstacle. La danse—ce qui devait précisément être le remède à la timidité et à l’image négative de soi—finit par être le poison. La Plage n’est plus un lieu d’épanouissement mais une sorte de prison, le lieu où toutes les autres facettes de la personne sociale arrêtent leur développement, stagnent. Et L’homme qui danse, le tableau de cette solitude en mouvement. [End Page 241] Mark D. Lee Mount Allison University (NB), Canada Copyright © 2023 American Association of Teachers of French