{"title":"面对死亡请求时照顾者的道德规范","authors":"Roland Chvetzoff , Bénédicte Mastroianni , Carole Bouleuc , Gisèle Chvetzoff","doi":"10.1016/j.medpal.2024.07.001","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><p>Le projet de légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, désormais dénommés aide à mourir, inquiète de nombreux soignants pour lesquels « donner la mort n’est pas un soin ». Pour d’autres, l’aide à mourir constitue un progrès sociétal. Mais devant toute demande manifeste de mourir, se cachent toujours des désirs latents que les professionnels de soins palliatifs auront à questionner, confrontés à leur propre pulsion de mort, celle des patients et de leurs proches, celle de la société. La légalisation de l’aide à mourir peut en effet s’entendre comme l’expression d’un néolibéralisme qui nécessite que les équipes soignantes soient encore capables d’incarner la loi symbolique de l’interdit fondamental du meurtre, même si le législateur lui accorde des exceptions. Si meurtre il doit y avoir du côté des soignants, c’est avant tout un meurtre symbolique : celui du patient idéalisé du bien vieillir, du bien mourir, du bien naître. C’est aussi, paradoxalement, celui du « trop bon soignant ». À défaut, par un excès de culpabilité soignante et une défaite de la pensée, le patient risque d’être tué dans le réel… Mais ainsi en est-il du tragique de la vie.</p></div><div><p>Plans to legalize euthanasia and assisted suicide, now known as “aid in dying”, worry many caregivers, for whom “giving death is not care”. For others, assisted dying represents societal progress. However, in the face of any overt request to die, there are always latent desires that palliative care professionals will have to question, confronted as they are with their own death drive, that of patients and their loved ones, and that of society as a whole. The legalization of assisted dying can be seen as the expression of a neoliberalism that requires care teams to be able to embody the symbolic law of the fundamental prohibition of murder, even if the legislator grants exceptions. If there is to be murder on the part of caregivers, it is first and foremost a symbolic murder: that of the idealized patient of aging well, dying well, being born well. Paradoxically, it's also that of the “too-good” caregiver. Failing that, through an excess of caregiver guilt and a defeat of thought, the patient risks being killed in the real world… But so it is with the tragedy of life.</p></div>","PeriodicalId":42610,"journal":{"name":"Medecine Palliative","volume":"23 5","pages":"Pages 253-257"},"PeriodicalIF":0.2000,"publicationDate":"2024-09-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"L’éthique du soignant face à la demande de mourir\",\"authors\":\"Roland Chvetzoff , Bénédicte Mastroianni , Carole Bouleuc , Gisèle Chvetzoff\",\"doi\":\"10.1016/j.medpal.2024.07.001\",\"DOIUrl\":null,\"url\":null,\"abstract\":\"<div><p>Le projet de légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, désormais dénommés aide à mourir, inquiète de nombreux soignants pour lesquels « donner la mort n’est pas un soin ». Pour d’autres, l’aide à mourir constitue un progrès sociétal. Mais devant toute demande manifeste de mourir, se cachent toujours des désirs latents que les professionnels de soins palliatifs auront à questionner, confrontés à leur propre pulsion de mort, celle des patients et de leurs proches, celle de la société. La légalisation de l’aide à mourir peut en effet s’entendre comme l’expression d’un néolibéralisme qui nécessite que les équipes soignantes soient encore capables d’incarner la loi symbolique de l’interdit fondamental du meurtre, même si le législateur lui accorde des exceptions. Si meurtre il doit y avoir du côté des soignants, c’est avant tout un meurtre symbolique : celui du patient idéalisé du bien vieillir, du bien mourir, du bien naître. C’est aussi, paradoxalement, celui du « trop bon soignant ». 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Plans to legalize euthanasia and assisted suicide, now known as “aid in dying”, worry many caregivers, for whom “giving death is not care”. For others, assisted dying represents societal progress. However, in the face of any overt request to die, there are always latent desires that palliative care professionals will have to question, confronted as they are with their own death drive, that of patients and their loved ones, and that of society as a whole. The legalization of assisted dying can be seen as the expression of a neoliberalism that requires care teams to be able to embody the symbolic law of the fundamental prohibition of murder, even if the legislator grants exceptions. If there is to be murder on the part of caregivers, it is first and foremost a symbolic murder: that of the idealized patient of aging well, dying well, being born well. Paradoxically, it's also that of the “too-good” caregiver. Failing that, through an excess of caregiver guilt and a defeat of thought, the patient risks being killed in the real world… But so it is with the tragedy of life.
期刊介绍:
La revue des soins palliatifs, des soins de support, de l''accompagnement et de l''éthique et pratique médicales. Un lieu d''information et de réflexion. Outil de transmission et d''échange des différents savoirs scientifiques, Médecine palliative vous permettra d''enrichir et d''élargir vos connaissances grâce à une approche globale, transversale et pluridisciplinaire.Les différents acteurs, professionnels ou non, impliqués dans la prise en charge palliative et continue ainsi que dans l''accompagnement et dans la réflexion éthique rendent compte de leurs travaux, de leurs expériences, de leur vécu, de leur dynamisme et de leur complémentarité.Un contenu scientifique riche dans sa diversité. Retrouvez une information variée : synthèses sur des sujets médicaux, publications d''études originales, rapports de pratiques, informations professionnelles, expériences partagées, analyses de presse, agenda...