{"title":"Le retour à la nature et la désobéissance civile: fuir la civilisation pour reconnecter avec le soi dans Encabanée de Gabrielle Filteau-Chiba","authors":"Jimmy Thibeault","doi":"10.3828/qs.2024.5","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Abstract:Il semble que le début du vingt-et-unième siècle représente pour plusieurs un moment de désenchantement face à une humanité constamment confrontée à des tensions sociétales et existentielles. Un désenchantement prend forme, notamment dans le sillage des attentats terroristes du 11 septembre 2001 et de ceux qui se sont succédé dans les grandes villes (Paris, Londres, Madrid), confrontant l’occident à une violence mondiale qui la rattrapait, dans le sillage, aussi, d’une angoisse écologique grandissante face à une planète à bout de souffle. C’est dans ce contexte qu’on assiste, depuis le début des années 2000, à la résurgence des régions et de la nature dans la littérature québécoise. Si la région semble permettre pour plusieurs de retrouver un certain attachement à un mode de vie rurale dont les valeurs sont héritées d’un certain régionalisme, pour d’autres, le retour à la nature s’inscrit dans une démarche de refus d’un monde contemporain voué à sa propre destruction: le retour à la nature agit comme un geste de désobéissance civile en ce sens qu’il oppose les protagonistes à l’ordre social. C’est notamment le cas du roman Encabanée (2018) de Gabrielle Filteau-Chiba où la protagoniste, Anouk, quitte le confort de la civilisation urbaine de Montréal, pour une cabane isolée dans la forêt du Kamouraska. La narratrice, à l’instar du Henry David Thoreau de Walden (1854), se détache volontairement du monde civilisé afin de reconnecter avec la nature. Pendant son séjour, elle fait la rencontre de Rio, un activiste responsable d’un acte récent de sabotage. Comment définir l’acte entre le geste de l’activiste pour la suite du monde et l’acte terroriste au nom d’une lutte qu’on considère juste. Anouk s’en remettra à la sagesse de Thoreau pour définir sa posture. Dans cet article, je propose d’examiner le discours de désenchantement de la narratrice à l’égard de la société contemporaine, de mettre en lumière son repositionnement face à la nature et, enfin, de mieux comprendre comment ce retrait de la narratrice apparaît dans le roman comme une marque de désobéissance civile.Abstract:It seems that the beginning of the twenty-first century represents for many a moment of disenchantment with a humanity constantly confronted with social and existential tensions. This disenchantment takes place most notably in the wake of the terrorist attacks of September 11, 2001 and those that followed in major cities (Paris, London, Madrid), confronting the West with a worldwide violence that finally caught up with it, in the wake, as well, of a growing environmental anguish for a planet in crisis. In this context, since the beginning of the new millennium, we witness the resurgence of the regional and nature in Québec’s literature. If the rural seems to permit certain writers to reconnect with a rural way of life rooted in inherited values, for others, the return to nature reflects a refusal of a contemporary world dedicated to its own destruction: a return to nature functions as an act of civil disobedience in the sense that it opposes protagonists to the social order. This is particularly the case in the novel Encabanée (2018) by Gabrielle Filteau-Chiba, in which the protagonist, Anouk, leaves the comfort of Montréal’s urban civilization for an isolated forest in the region of Kamouraska. The narrator, like Henry David Thoreau in Walden (1854), voluntarily leaves the civilized world in order to reconnect with nature. During her stay, she meets Rio, an ecological activist responsible for a recent act of sabotage. How should she receive his act of violence, performed in the interest “pour la suite du monde” (for the world to continue, a reference to Pierre Perreault’s classic film) and terrorist acts made in the name of fights their authors consider just? Anouk turns to Thoreau’s wisdom to define her own position. 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Abstract
Abstract:Il semble que le début du vingt-et-unième siècle représente pour plusieurs un moment de désenchantement face à une humanité constamment confrontée à des tensions sociétales et existentielles. Un désenchantement prend forme, notamment dans le sillage des attentats terroristes du 11 septembre 2001 et de ceux qui se sont succédé dans les grandes villes (Paris, Londres, Madrid), confrontant l’occident à une violence mondiale qui la rattrapait, dans le sillage, aussi, d’une angoisse écologique grandissante face à une planète à bout de souffle. C’est dans ce contexte qu’on assiste, depuis le début des années 2000, à la résurgence des régions et de la nature dans la littérature québécoise. Si la région semble permettre pour plusieurs de retrouver un certain attachement à un mode de vie rurale dont les valeurs sont héritées d’un certain régionalisme, pour d’autres, le retour à la nature s’inscrit dans une démarche de refus d’un monde contemporain voué à sa propre destruction: le retour à la nature agit comme un geste de désobéissance civile en ce sens qu’il oppose les protagonistes à l’ordre social. C’est notamment le cas du roman Encabanée (2018) de Gabrielle Filteau-Chiba où la protagoniste, Anouk, quitte le confort de la civilisation urbaine de Montréal, pour une cabane isolée dans la forêt du Kamouraska. La narratrice, à l’instar du Henry David Thoreau de Walden (1854), se détache volontairement du monde civilisé afin de reconnecter avec la nature. Pendant son séjour, elle fait la rencontre de Rio, un activiste responsable d’un acte récent de sabotage. Comment définir l’acte entre le geste de l’activiste pour la suite du monde et l’acte terroriste au nom d’une lutte qu’on considère juste. Anouk s’en remettra à la sagesse de Thoreau pour définir sa posture. Dans cet article, je propose d’examiner le discours de désenchantement de la narratrice à l’égard de la société contemporaine, de mettre en lumière son repositionnement face à la nature et, enfin, de mieux comprendre comment ce retrait de la narratrice apparaît dans le roman comme une marque de désobéissance civile.Abstract:It seems that the beginning of the twenty-first century represents for many a moment of disenchantment with a humanity constantly confronted with social and existential tensions. This disenchantment takes place most notably in the wake of the terrorist attacks of September 11, 2001 and those that followed in major cities (Paris, London, Madrid), confronting the West with a worldwide violence that finally caught up with it, in the wake, as well, of a growing environmental anguish for a planet in crisis. In this context, since the beginning of the new millennium, we witness the resurgence of the regional and nature in Québec’s literature. If the rural seems to permit certain writers to reconnect with a rural way of life rooted in inherited values, for others, the return to nature reflects a refusal of a contemporary world dedicated to its own destruction: a return to nature functions as an act of civil disobedience in the sense that it opposes protagonists to the social order. This is particularly the case in the novel Encabanée (2018) by Gabrielle Filteau-Chiba, in which the protagonist, Anouk, leaves the comfort of Montréal’s urban civilization for an isolated forest in the region of Kamouraska. The narrator, like Henry David Thoreau in Walden (1854), voluntarily leaves the civilized world in order to reconnect with nature. During her stay, she meets Rio, an ecological activist responsible for a recent act of sabotage. How should she receive his act of violence, performed in the interest “pour la suite du monde” (for the world to continue, a reference to Pierre Perreault’s classic film) and terrorist acts made in the name of fights their authors consider just? Anouk turns to Thoreau’s wisdom to define her own position. In this article, I examine the narrator’s discourse of disenchantment toward contemporary society in order to clarify her repositioning in relation to nature, and, finally, to better understand how the narrator’s retreat appears in the novel as an act of civil disobedience.