{"title":"Le tragique dans Roxana : Defoe avait-il lu The Complete Art of Poetry (1718) de Charles Gildon ?","authors":"B. Millet","doi":"10.4000/episteme.5174","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Il est communement admis que Daniel Defoe, en sa qualite d’ecrivain dissident, n’etait guere familier du renouveau des debats sur la tragedie qui marquerent l’Angleterre du debut du XVIIIe siecle. Cependant, son recours strategique au mot « tragedie » a la fin de son dernier roman Roxana (1724) pour rendre compte de la nature de son denouement pourrait bien etre redevable a The Complete Art of Poetry (1718) du critique et romancier rival Charles Gildon (1665 ?-1724), ecrivain que Defoe avait lu et cite en d’autres occasions au cours des annees 1720. En usant du mot tragedie pour renvoyer a la catastrophe de son dernier roman, Defoe pourrait tres bien avoir voulu rendre hommage a la figure euripidienne de Medee, personnage qui avait ete recemment porte sur la scene georgienne et qui semble avoir faconne les sentiments ambivalents de Roxana pour sa descendance. La participation de Roxana a l’assassinat probable de sa propre fille l’assimile a une Medee moderne, figure familiere a bien des lecteurs de Defoe et de Gildon. Dans cette perspective, Medee, qui est presentee dans le traite de Gildon comme l’exemple meme de l’heroisme tragique, est un modele bien plus probable que les paradigmes communement retenus de la tragedie de la damnation que sont Doctor Faustus (1592) de Marlowe ou Macbeth (vers 1606) de Shakespeare, traditionnellement presentees depuis les Romantiques et tout au long de la seconde moitie du XXe siecle, comme les modeles tragiques de Roxana.","PeriodicalId":40360,"journal":{"name":"Etudes Episteme","volume":" ","pages":""},"PeriodicalIF":0.1000,"publicationDate":"2019-12-15","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Etudes Episteme","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.4000/episteme.5174","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"0","JCRName":"HUMANITIES, MULTIDISCIPLINARY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Il est communement admis que Daniel Defoe, en sa qualite d’ecrivain dissident, n’etait guere familier du renouveau des debats sur la tragedie qui marquerent l’Angleterre du debut du XVIIIe siecle. Cependant, son recours strategique au mot « tragedie » a la fin de son dernier roman Roxana (1724) pour rendre compte de la nature de son denouement pourrait bien etre redevable a The Complete Art of Poetry (1718) du critique et romancier rival Charles Gildon (1665 ?-1724), ecrivain que Defoe avait lu et cite en d’autres occasions au cours des annees 1720. En usant du mot tragedie pour renvoyer a la catastrophe de son dernier roman, Defoe pourrait tres bien avoir voulu rendre hommage a la figure euripidienne de Medee, personnage qui avait ete recemment porte sur la scene georgienne et qui semble avoir faconne les sentiments ambivalents de Roxana pour sa descendance. La participation de Roxana a l’assassinat probable de sa propre fille l’assimile a une Medee moderne, figure familiere a bien des lecteurs de Defoe et de Gildon. Dans cette perspective, Medee, qui est presentee dans le traite de Gildon comme l’exemple meme de l’heroisme tragique, est un modele bien plus probable que les paradigmes communement retenus de la tragedie de la damnation que sont Doctor Faustus (1592) de Marlowe ou Macbeth (vers 1606) de Shakespeare, traditionnellement presentees depuis les Romantiques et tout au long de la seconde moitie du XXe siecle, comme les modeles tragiques de Roxana.