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Pour aborder l’evolution de la prise en charge litteraire du fait divers, l’article commence par proposer un apercu des experimentations conduites dans la premiere moitie du siecle : le travail journalistique d’un romancier, l’abbe Prevost, puis l’elaboration, par Samuel Richardson, d’une esthetique documentaire qui s’imposera au roman jusqu’a la fin du siecle. Dans ce contexte, devenu celui d’une extreme permeabilite des frontieres entre fait et fiction, est alors analysee la prise en charge romanesque d’un celebre fait divers : le double suicide de deux amants a Lyon en 1770. Les Lettres de deux amants, habitants de Lyon, publiees par M. Leonard, remplies d’allusions a d’autres romans documents (de Richardson, Rousseau, Goldsmith, Goethe), viennent nous eclairer sur le role singulier devolu a l’intertextualite, autrement dit aux experiences livresques evoquees par l’auteur ou par ses personnages, dans l’elaboration d’une causalite du fait divers. 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Vrai et usage du vrai : les interactions entre fait divers et fiction romanesque au XVIIIe siècle
L’essor du roman au XVIIIe siecle et la reconnaissance progressive de son utilite sont indissociables de l’interet grandissant qu’il porte a l’ecriture factuelle. Si le refus de la fiction fait partie d’une strategie de contournement des normes litteraires, la valorisation du fait vrai et le recours a des formes dediees (nouvelles journalistiques, memoires, correspondances) jouent un role essentiel dans la construction d’une nouvelle logique d’action et d’une nouvelle vraisemblance. La demonstration de l’exemplarite du fait divers et son ecriture deviennent alors un enjeu capital. Pour aborder l’evolution de la prise en charge litteraire du fait divers, l’article commence par proposer un apercu des experimentations conduites dans la premiere moitie du siecle : le travail journalistique d’un romancier, l’abbe Prevost, puis l’elaboration, par Samuel Richardson, d’une esthetique documentaire qui s’imposera au roman jusqu’a la fin du siecle. Dans ce contexte, devenu celui d’une extreme permeabilite des frontieres entre fait et fiction, est alors analysee la prise en charge romanesque d’un celebre fait divers : le double suicide de deux amants a Lyon en 1770. Les Lettres de deux amants, habitants de Lyon, publiees par M. Leonard, remplies d’allusions a d’autres romans documents (de Richardson, Rousseau, Goldsmith, Goethe), viennent nous eclairer sur le role singulier devolu a l’intertextualite, autrement dit aux experiences livresques evoquees par l’auteur ou par ses personnages, dans l’elaboration d’une causalite du fait divers. L’intertexte devient non seulement un recueil virtuel de « precedents » et de modeles, mais aussi le symptome d’une pratique de lecture immersive, elle-meme susceptible d’engendrer de nouveaux faits divers.