Pour lutter contre l’exclusion sociale, les États européens se tournent aujourd’hui vers les méthodes de gouvernance relationnelle. Alors que les professionnel·les du travail social ont développé des techniques élaborées pour produire des citoyen·nes engagé·es et des communautés cohésives, la réception de ces interventions par les individu·es ciblé·es reste mal connue. Appuyé sur une enquête ethnographique menée en parallèle à Paris et à Helsinki, cet article forge une analyse relationnelle de la « seconde production » des politiques publiques, appréhendée à l’échelle de la rencontre entre les professionnel·les du travail social et les femmes immigrées habitantes des quartiers populaires. Il développe la notion de « tactiques de participation » pour analyser les tentatives de ces dernières de ménager une marge de manœuvre au sein des programmes participatifs. L’article met en lumière la pluralité des tactiques de participation inventées par les femmes immigrées et la multiplicité des situations de vie dans lesquelles celles-ci s’inscrivent. Il développe une approche relationnelle de l’analyse des processus de réception en mettant en évidence la nature du lien qui connecte les bénéficiaires aux institutions locales comme l’élément principal qui définit l’issue de ces tactiques.
{"title":"Faire avec la maison de quartier. Les tactiques de participation des femmes immigrées dans les quartiers populaires de Paris et Helsinki","authors":"Linda Haapajärvi","doi":"10.3917/parti.036.0067","DOIUrl":"https://doi.org/10.3917/parti.036.0067","url":null,"abstract":"Pour lutter contre l’exclusion sociale, les États européens se tournent aujourd’hui vers les méthodes de gouvernance relationnelle. Alors que les professionnel·les du travail social ont développé des techniques élaborées pour produire des citoyen·nes engagé·es et des communautés cohésives, la réception de ces interventions par les individu·es ciblé·es reste mal connue. Appuyé sur une enquête ethnographique menée en parallèle à Paris et à Helsinki, cet article forge une analyse relationnelle de la « seconde production » des politiques publiques, appréhendée à l’échelle de la rencontre entre les professionnel·les du travail social et les femmes immigrées habitantes des quartiers populaires. Il développe la notion de « tactiques de participation » pour analyser les tentatives de ces dernières de ménager une marge de manœuvre au sein des programmes participatifs. L’article met en lumière la pluralité des tactiques de participation inventées par les femmes immigrées et la multiplicité des situations de vie dans lesquelles celles-ci s’inscrivent. Il développe une approche relationnelle de l’analyse des processus de réception en mettant en évidence la nature du lien qui connecte les bénéficiaires aux institutions locales comme l’élément principal qui définit l’issue de ces tactiques.","PeriodicalId":500558,"journal":{"name":"Participations","volume":"13 10","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-10-25","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"135216007","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
À mesure que l’État français conduit sa dématérialisation, l’inclusion des populations en difficulté avec le numérique devient un enjeu majeur des politiques publiques. Cette contribution s’intéresse au dispositif « Conseiller numérique France services » et au travail relationnel qu’il implique. Lancé par le gouvernement en 2021, il visait à financer le recrutement de médiateurs et médiatrices numériques au sein de collectivités territoriales et d’associations. À partir d’une observation participante dans une petite association rurale de formation à l’informatique, l’article montre que la mise en œuvre du dispositif repose sur les ressources sociales locales des promoteurs et promotrices du numérique et sur leur capacité à les mobiliser pour créer et s’insérer dans des réseaux institutionnels complexes. Leur travail en direction des publics s’appuie sur des relations fortement personnalisées, porteuses de malentendus auprès des plus précaires.
{"title":"Des citoyen·nes à reconnecter ? La fracture numérique et le réengagement de l’État dans les mondes ruraux en France","authors":"Chloé Devez","doi":"10.3917/parti.036.0117","DOIUrl":"https://doi.org/10.3917/parti.036.0117","url":null,"abstract":"À mesure que l’État français conduit sa dématérialisation, l’inclusion des populations en difficulté avec le numérique devient un enjeu majeur des politiques publiques. Cette contribution s’intéresse au dispositif « Conseiller numérique France services » et au travail relationnel qu’il implique. Lancé par le gouvernement en 2021, il visait à financer le recrutement de médiateurs et médiatrices numériques au sein de collectivités territoriales et d’associations. À partir d’une observation participante dans une petite association rurale de formation à l’informatique, l’article montre que la mise en œuvre du dispositif repose sur les ressources sociales locales des promoteurs et promotrices du numérique et sur leur capacité à les mobiliser pour créer et s’insérer dans des réseaux institutionnels complexes. Leur travail en direction des publics s’appuie sur des relations fortement personnalisées, porteuses de malentendus auprès des plus précaires.","PeriodicalId":500558,"journal":{"name":"Participations","volume":"20 2","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-10-25","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"135216775","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
Cet article porte sur l’expérimentation de démocratie directe communaliste qui s’est déroulée à Commercy, en France, depuis le début du mouvement des Gilets jaunes jusqu’au projet de présenter une liste aux élections municipales de 2020. L’article commence par mettre en récit cette expérience afin de comprendre comment les participants et participantes imaginent l’idéal de donner le pouvoir au peuple assemblé, ainsi que de saisir les formes expérimentales concrètes qu’ils et elles créent pour ce faire. Après avoir analysé la manière dont ce mouvement réinvente la représentation, l’article entreprend ensuite d’exposer les enjeux constitutionnels rencontrés par les acteurs et actrices dans leurs réflexions sur l’institutionnalisation de l’assemblée. Lors de ce processus se pose en effet une interrogation fondamentale propre à tout pouvoir constituant : celle de sa légitimité à institutionnaliser un nouveau système démocratique. À travers cette expérience, il s’agit donc de comprendre comment le paradoxe constituant peut être pensé, et résolu, par un mouvement de démocratie directe communaliste.
{"title":"Des Gilets jaunes à l’Assemblée Citoyenne de Commercy (France) : les enjeux politiques et constitutionnels d’une expérience de démocratie directe communaliste","authors":"Sixtine van Outryve","doi":"10.3917/parti.036.0193","DOIUrl":"https://doi.org/10.3917/parti.036.0193","url":null,"abstract":"Cet article porte sur l’expérimentation de démocratie directe communaliste qui s’est déroulée à Commercy, en France, depuis le début du mouvement des Gilets jaunes jusqu’au projet de présenter une liste aux élections municipales de 2020. L’article commence par mettre en récit cette expérience afin de comprendre comment les participants et participantes imaginent l’idéal de donner le pouvoir au peuple assemblé, ainsi que de saisir les formes expérimentales concrètes qu’ils et elles créent pour ce faire. Après avoir analysé la manière dont ce mouvement réinvente la représentation, l’article entreprend ensuite d’exposer les enjeux constitutionnels rencontrés par les acteurs et actrices dans leurs réflexions sur l’institutionnalisation de l’assemblée. Lors de ce processus se pose en effet une interrogation fondamentale propre à tout pouvoir constituant : celle de sa légitimité à institutionnaliser un nouveau système démocratique. À travers cette expérience, il s’agit donc de comprendre comment le paradoxe constituant peut être pensé, et résolu, par un mouvement de démocratie directe communaliste.","PeriodicalId":500558,"journal":{"name":"Participations","volume":"95 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-10-25","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"135111333","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
Prenant pour exemple une association de femmes installée dans une cité de logements sociaux de la banlieue parisienne, cet article analyse l’émergence conjointe au cours des années 1980 d’une catégorie de public, les « femmes du quartier », et d’une forme de travail social, l’« animation de quartier ». À partir d’une enquête sociohistorique, l’article reconstitue les conditions de création de l’association, le parcours et les pratiques de ses deux premières animatrices de 1982 à 1991. Il interroge plus particulièrement le recours à une proximité de genre entre animatrices et adhérentes de l’association, comme principal ressort du travail d’animation, dans un contexte d’essoufflement des formes d’encadrement existantes dans cette ville communiste de l’ancienne Banlieue rouge. Après avoir exposé les dynamiques locales qui soutiennent l’émergence d’une catégorie de public définie par le genre et le lieu de résidence, l’article analyse comment les animatrices mobilisent leurs expériences de jeunes mères étrangères, de résidentes du quartier et de militantes pour accomplir la tâche qui leur est confiée. Il montre finalement qu’en reprenant à leur compte une catégorie à laquelle elles sont assignées, elles façonnent un rôle peu défini d’animatrice de quartier, au profit d’une conception militante du travail social.
{"title":"« Travailler à partir de sa propre vie ». Proximité de genre et travail d’animation dans une association de femmes immigrées","authors":"Violette Arnoulet","doi":"10.3917/parti.036.0089","DOIUrl":"https://doi.org/10.3917/parti.036.0089","url":null,"abstract":"Prenant pour exemple une association de femmes installée dans une cité de logements sociaux de la banlieue parisienne, cet article analyse l’émergence conjointe au cours des années 1980 d’une catégorie de public, les « femmes du quartier », et d’une forme de travail social, l’« animation de quartier ». À partir d’une enquête sociohistorique, l’article reconstitue les conditions de création de l’association, le parcours et les pratiques de ses deux premières animatrices de 1982 à 1991. Il interroge plus particulièrement le recours à une proximité de genre entre animatrices et adhérentes de l’association, comme principal ressort du travail d’animation, dans un contexte d’essoufflement des formes d’encadrement existantes dans cette ville communiste de l’ancienne Banlieue rouge. Après avoir exposé les dynamiques locales qui soutiennent l’émergence d’une catégorie de public définie par le genre et le lieu de résidence, l’article analyse comment les animatrices mobilisent leurs expériences de jeunes mères étrangères, de résidentes du quartier et de militantes pour accomplir la tâche qui leur est confiée. Il montre finalement qu’en reprenant à leur compte une catégorie à laquelle elles sont assignées, elles façonnent un rôle peu défini d’animatrice de quartier, au profit d’une conception militante du travail social.","PeriodicalId":500558,"journal":{"name":"Participations","volume":"17 5","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-10-25","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"135216844","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
Pour gérer la crise des réfugié·es, l’État français a sous-traité l’accompagnement des demandeurs et demandeuses d’asile et des réfugié·es à des associations. La sous-traitance soumet ces associations à des objectifs d’efficacité et d’austérité, contraignant le travail de leurs salarié·es et mettant à mal l’idéal d’un travail social humain et relationnel. Cet article analyse les pratiques d’accompagnement des salarié·es de ces associations dans des centres d’hébergement et des programmes de réinstallation. Fortement contraint·es dans leur capacité à humaniser les opérations de l’État, ces salarié·es entreprennent un travail social « réaliste ». Ils et elles façonnent le « rapport ordinaire » (Spire, 2016) des demandeurs et demandeuses d’asile et des réfugié·es à l’État en les socialisant à une forme de résignation face à des services publics dégradés.
{"title":"Un travail social « réaliste » : Comment les associations « opératrices » de l’action sociale tempèrent les attentes envers l’État français","authors":"Tessa Bonduelle","doi":"10.3917/parti.036.0165","DOIUrl":"https://doi.org/10.3917/parti.036.0165","url":null,"abstract":"Pour gérer la crise des réfugié·es, l’État français a sous-traité l’accompagnement des demandeurs et demandeuses d’asile et des réfugié·es à des associations. La sous-traitance soumet ces associations à des objectifs d’efficacité et d’austérité, contraignant le travail de leurs salarié·es et mettant à mal l’idéal d’un travail social humain et relationnel. Cet article analyse les pratiques d’accompagnement des salarié·es de ces associations dans des centres d’hébergement et des programmes de réinstallation. Fortement contraint·es dans leur capacité à humaniser les opérations de l’État, ces salarié·es entreprennent un travail social « réaliste ». Ils et elles façonnent le « rapport ordinaire » (Spire, 2016) des demandeurs et demandeuses d’asile et des réfugié·es à l’État en les socialisant à une forme de résignation face à des services publics dégradés.","PeriodicalId":500558,"journal":{"name":"Participations","volume":"118 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-10-25","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"135217630","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}