La revue du Chat Noir1, regroupant « une Societe bruyante et gaie de jeunes hommes2 », constitue, en adequation avec l’esprit de cabaret et d’avant‑garde de la fin du xixe siecle, un cadre en marge de la societe dont les valeurs dominantes, tels le bon sens, l’esprit de serieux, le positivisme, le scientisme et le materialisme, sont remises en cause. Les poetes du Chat Noir fondent en effet leur esthetique sur l’ecart, sur l’excentricite vis‑a‑vis du discours officiel et normatif, dont ils pronent le retournement : il s’agit d’aller a rebours des conventions en en ebranlant les fondements par la parodie, le demantelement et la profanation des formes traditionnelles et des schemas convenus, devenus, selon eux, des automatismes d’ecriture. Dans ce contexte, la fantaisie, ce « domaine libre […], ou tous les ecarts de l’imagination sont toleres jusqu’aux limites du gout3 », semble avoir tout particulierement sa place.Pourtant, si la fantaisie « plan[ait] [...] toutes ailes deployees4 » au‑dessus des œuvres de leurs precurseurs, les Hydropathes, comme le souligne Emile Goudeau, on peut se questionner sur son statut dans la poesie de la revue du Chat Noir : le terme de fantaisie est etonnamment rarement cite, aux profits d’autres termes plus « modernes », est employe a contre‑courant, enfin ses apparitions font le plus souvent signe vers un ecroulement, une disparition. Nous pouvons alors nous demander dans quelle mesure les poetes du Chat Noir, plutot que de demanteler cette notio
{"title":"La fantaisie dans la poésie du Chat Noir : une fantaisie de pacotille ?","authors":"Caroline Crépiat","doi":"10.58282/colloques.2571","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2571","url":null,"abstract":"La revue du Chat Noir1, regroupant « une Societe bruyante et gaie de jeunes hommes2 », constitue, en adequation avec l’esprit de cabaret et d’avant‑garde de la fin du xixe siecle, un cadre en marge de la societe dont les valeurs dominantes, tels le bon sens, l’esprit de serieux, le positivisme, le scientisme et le materialisme, sont remises en cause. Les poetes du Chat Noir fondent en effet leur esthetique sur l’ecart, sur l’excentricite vis‑a‑vis du discours officiel et normatif, dont ils pronent le retournement : il s’agit d’aller a rebours des conventions en en ebranlant les fondements par la parodie, le demantelement et la profanation des formes traditionnelles et des schemas convenus, devenus, selon eux, des automatismes d’ecriture. Dans ce contexte, la fantaisie, ce « domaine libre […], ou tous les ecarts de l’imagination sont toleres jusqu’aux limites du gout3 », semble avoir tout particulierement sa place.Pourtant, si la fantaisie « plan[ait] [...] toutes ailes deployees4 » au‑dessus des œuvres de leurs precurseurs, les Hydropathes, comme le souligne Emile Goudeau, on peut se questionner sur son statut dans la poesie de la revue du Chat Noir : le terme de fantaisie est etonnamment rarement cite, aux profits d’autres termes plus « modernes », est employe a contre‑courant, enfin ses apparitions font le plus souvent signe vers un ecroulement, une disparition. Nous pouvons alors nous demander dans quelle mesure les poetes du Chat Noir, plutot que de demanteler cette notio","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"24 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2016-10-08","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"127800670","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
Dans une serie d’ouvrages et d’articles parus depuis 1999, j’ai propose et defendu l’hypothese qu’il existait en France deux romantismes, et que le terme de « fantaisie » pourrait constituer une etiquette pertinente pour recouvrir et designer une des branches de cette opposition1. Il faut voir d’abord que « romantisme » est un mot qui ne parait pas pouvoir etre mis en correspondance avec une esthetique precise. Il renvoie plutot a un besoin de renouvellement, de regeneration de l’art, qui s’est manifeste a une epoque – le debut du xixe siecle – ou la litterature, et en particulier la poesie, apparaissait enlisee dans l’academisme et ayant perdu tout lien avec le monde contemporain, le temps present. Selon un phenomene bien connu en politique, quelques idees simples suffisent a coaliser et federer des individus dans l’opposition, mais il est frequent qu’une fois parvenus au pouvoir, ceux-ci laissent apparaitre de profondes divisions. C’est ce qui s’est passe avec les romantiques : unis dans une detestation commune des « perruques », qui occupaient le champ litteraire, ils ont montre de grandes divergences entre eux a partir du moment ou leur victoire est devenue un fait accompli et ou leur regne a commence. La question de cette opposition n’est pas neuve, meme si la detection des mesententes entre ecrivains « renovateurs » a pu etre problematique. Est ici en cause l’habilete qu’a montree Victor Hugo a faire de son combat le combat de tous, et a eclipser les voix contradictoire
{"title":"Romantisme et fantaisie","authors":"M. Brix","doi":"10.58282/colloques.2608","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2608","url":null,"abstract":"Dans une serie d’ouvrages et d’articles parus depuis 1999, j’ai propose et defendu l’hypothese qu’il existait en France deux romantismes, et que le terme de « fantaisie » pourrait constituer une etiquette pertinente pour recouvrir et designer une des branches de cette opposition1. Il faut voir d’abord que « romantisme » est un mot qui ne parait pas pouvoir etre mis en correspondance avec une esthetique precise. Il renvoie plutot a un besoin de renouvellement, de regeneration de l’art, qui s’est manifeste a une epoque – le debut du xixe siecle – ou la litterature, et en particulier la poesie, apparaissait enlisee dans l’academisme et ayant perdu tout lien avec le monde contemporain, le temps present. Selon un phenomene bien connu en politique, quelques idees simples suffisent a coaliser et federer des individus dans l’opposition, mais il est frequent qu’une fois parvenus au pouvoir, ceux-ci laissent apparaitre de profondes divisions. C’est ce qui s’est passe avec les romantiques : unis dans une detestation commune des « perruques », qui occupaient le champ litteraire, ils ont montre de grandes divergences entre eux a partir du moment ou leur victoire est devenue un fait accompli et ou leur regne a commence. La question de cette opposition n’est pas neuve, meme si la detection des mesententes entre ecrivains « renovateurs » a pu etre problematique. Est ici en cause l’habilete qu’a montree Victor Hugo a faire de son combat le combat de tous, et a eclipser les voix contradictoire","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"10 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2015-10-09","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"125389835","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
C’est un triste metier que de suivre la foule, Et de vouloir crier plus fort que les meneurs, Pendant qu’on se raccroche au manteau des traineurs. « Dedicace » de La Coupe et les Levres, 1832.L’ensemble de la carriere artistique de Musset se place sous le signe de la fantaisie, autrement dit du refus de « suivre la foule » et de tenir le « manteau des traineurs » comme on tient les cordons d’une procession funebre. Non que le poete ait toujours revendique l’etendard esthetique de la fantaisie – il se defie trop des bannieres ou des poetiques – mais la critique a tres tot employe ce terme pour decrire sa maniere poetique. En decembre 1829, quand paraissent les Contes d’Espagne et d’Italie, le mot « fantaisie » est couramment utilise par la critique pour designer des œuvres ou dominent l’imagination et la liberte de ton. C’est en ce sens que Musset l’utilise dans la preface du recueil comme dans le dialogue des Marrons du feu.Rafael, cassant son verre. Aussi vrai que voilaUn verre de casse. – Mon amour s’en allaBientot. – Que voulez-vous ? moi, j’ai donne ma vieA ce dieu faineant qu’on nomme fantaisie.C’est lui qui, triste ou fou, de face ou de profil,Comme un polichinel me traine au bout d’un fil ;Lui qui tient les cordons de ma bourse, et la guideDe mon cheval ; jaloux, badaud, constant, perfide,En chasse au point du jour dimanche, et vendrediCloue sur l’oreiller jusque et passe midi.Ainsi je vais en tout – plus vain que la fumeeDe ma pipe, – accrochant tous les paves1. […]A
跟着人群走,想喊得比领先者更大声,却紧紧抓住领先者的外套,这是一种悲哀的工作。“奉献”的杯子和嘴唇,1832年。穆塞特的整个艺术生涯都以幻想为标志,也就是说,他拒绝“跟随人群”,像拉着葬礼队伍的绳子一样拿着“拖着的斗篷”。这并不是说诗人总是宣称幻想的审美标准——他太不相信旗帜或诗人了——但评论家很早就用这个词来描述他的诗歌风格。1829年12月,当西班牙和意大利的故事出现时,“幻想”一词通常被评论家用来设计作品,或支配想象力和语气的自由。在这个意义上,Musset在文集的序言中使用了它,就像在Marrons du feu的对话中一样。拉斐尔打碎了玻璃杯。就像碎玻璃一样真实。“我的爱人会高兴的。”-你想要什么?我把我的生命献给了这个懒惰的神,他叫幻想,他悲伤或疯狂,他的脸或侧面,就像一个polichinel拖着我的绳子,他拿着我钱包的绳子,牵着我的马。嫉妒,顽皮,固执,背信弃义,周日打猎,周五躺在枕头上直到中午。所以我做了所有的事情——比我烟斗里的烟还空虚——挂着所有的人行道。[...]了
{"title":"Musset en fantaisie : itinéraire de Mardoche à Mimi Pinson","authors":"S. Ledda","doi":"10.58282/colloques.2661","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2661","url":null,"abstract":"C’est un triste metier que de suivre la foule, Et de vouloir crier plus fort que les meneurs, Pendant qu’on se raccroche au manteau des traineurs. « Dedicace » de La Coupe et les Levres, 1832.L’ensemble de la carriere artistique de Musset se place sous le signe de la fantaisie, autrement dit du refus de « suivre la foule » et de tenir le « manteau des traineurs » comme on tient les cordons d’une procession funebre. Non que le poete ait toujours revendique l’etendard esthetique de la fantaisie – il se defie trop des bannieres ou des poetiques – mais la critique a tres tot employe ce terme pour decrire sa maniere poetique. En decembre 1829, quand paraissent les Contes d’Espagne et d’Italie, le mot « fantaisie » est couramment utilise par la critique pour designer des œuvres ou dominent l’imagination et la liberte de ton. C’est en ce sens que Musset l’utilise dans la preface du recueil comme dans le dialogue des Marrons du feu.Rafael, cassant son verre. Aussi vrai que voilaUn verre de casse. – Mon amour s’en allaBientot. – Que voulez-vous ? moi, j’ai donne ma vieA ce dieu faineant qu’on nomme fantaisie.C’est lui qui, triste ou fou, de face ou de profil,Comme un polichinel me traine au bout d’un fil ;Lui qui tient les cordons de ma bourse, et la guideDe mon cheval ; jaloux, badaud, constant, perfide,En chasse au point du jour dimanche, et vendrediCloue sur l’oreiller jusque et passe midi.Ainsi je vais en tout – plus vain que la fumeeDe ma pipe, – accrochant tous les paves1. […]A","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"103 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2015-10-09","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"130194496","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
« Loue soit Dieu ! puisque dans ma misere, De tous les biens qu’il voulut m’enlever, Il m’a laisse le bien que je prefere O mes amis, quel plaisir de rever, De se livrer au cours de ses pensees, Par le hasard l’une a l’autre enlacees, Non par dessein : le dessein y nuirait. L’heureux loisir qui delasse ma vie Perd de son charme en perdant son secret ; Il est volage, irregulier, distrait ; Le nonchaloir ajoute a son attrait, Et sa douceur est dans sa fantaisie. » Charles Nodier, Le Fou du Piree, conte (1835).« Supposez que je reve. » Jacques Derrida, Fichus (2002)A un Alexandre Dumas un peu trop prompt a enterrer sa raison, faisant rimer imagination avec hallucination, Gerard de Nerval repond dans la celebre lettre-preface des Filles du feu : « Moi, je m’etais brode sur toutes les coutures. – Du moment que j’avais cru saisir la serie de toutes mes existences anterieures, il ne m’en coutait pas plus d’avoir ete prince, roi, mage, genie et meme Dieu, la chaine etait brisee et marquait les heures pour des minutes. Ce serait le Songe de Scipion, la Vision du Tasse, ou la Divine Comedie du Dante, si j’etais parvenu a concentrer mes souvenirs en un chef d’œuvre1. » Par l’image de la broderie, c’est une des cles de l’œuvre nervalienne qui est donnee – une ecriture masquant et exhibant les sutures, conjuguant gout de l’ornement et liberte de l’invention, dans le vœu tantot jubilatoire, tantot desespere, de reunir des traits epars. On le voit, le poete s’inscrit ici dans la filiation
“赞美上帝!”因为在我的不幸中,在他想从我那里夺走的所有财产中,他留给我的是我最喜欢的财产,我的朋友们,在他的思想过程中,通过偶然的联系而不是有意的,这是多么愉快的事啊。破坏我生命的快乐休闲失去了它的魅力,失去了它的秘密;它是不稳定的,不规则的,分散的;nonchaloir增加了它的吸引力,它的甜蜜是它的幻想。Charles Nodier, Le Fou du Piree, conte(1835)。“假设我在做梦。雅克·德里达(Jacques Derrida, Fichus, 2002)对大仲马(Alexandre Dumas)来说,他太急于埋葬自己的理性,把想象和幻觉押韵,杰拉德·德·纳瓦尔(Gerard de Nerval)在《火之女》(Filles du feu)著名的序言信中回答道:“我在所有的缝线上都绣了自己。“从我认为我已经掌握了我过去所有生活的序列的那一刻起,我就不再需要做王子、国王、法师、精灵,甚至上帝了。如果我能把我的记忆集中在一部杰作上,那一定是西庇阿的梦,杯子的幻象,或者但丁的神曲。通过刺绣的形象,nervalienne作品的关键之一被赋予了——一种隐藏和展示缝线的文字,结合了对装饰的品味和对发明的自由,在如此喜悦和绝望的愿望中,收集不同的特征。正如我们所看到的,诗人在这里是从属关系的一部分
{"title":"Petits châteaux de Bohême, Prose et poésie de Gérard de Nerval : un prosimètre fantaisiste ?","authors":"Marie Frisson","doi":"10.58282/colloques.2615","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2615","url":null,"abstract":"« Loue soit Dieu ! puisque dans ma misere, De tous les biens qu’il voulut m’enlever, Il m’a laisse le bien que je prefere O mes amis, quel plaisir de rever, De se livrer au cours de ses pensees, Par le hasard l’une a l’autre enlacees, Non par dessein : le dessein y nuirait. L’heureux loisir qui delasse ma vie Perd de son charme en perdant son secret ; Il est volage, irregulier, distrait ; Le nonchaloir ajoute a son attrait, Et sa douceur est dans sa fantaisie. » Charles Nodier, Le Fou du Piree, conte (1835).« Supposez que je reve. » Jacques Derrida, Fichus (2002)A un Alexandre Dumas un peu trop prompt a enterrer sa raison, faisant rimer imagination avec hallucination, Gerard de Nerval repond dans la celebre lettre-preface des Filles du feu : « Moi, je m’etais brode sur toutes les coutures. – Du moment que j’avais cru saisir la serie de toutes mes existences anterieures, il ne m’en coutait pas plus d’avoir ete prince, roi, mage, genie et meme Dieu, la chaine etait brisee et marquait les heures pour des minutes. Ce serait le Songe de Scipion, la Vision du Tasse, ou la Divine Comedie du Dante, si j’etais parvenu a concentrer mes souvenirs en un chef d’œuvre1. » Par l’image de la broderie, c’est une des cles de l’œuvre nervalienne qui est donnee – une ecriture masquant et exhibant les sutures, conjuguant gout de l’ornement et liberte de l’invention, dans le vœu tantot jubilatoire, tantot desespere, de reunir des traits epars. On le voit, le poete s’inscrit ici dans la filiation","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"73 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2015-10-09","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"124698391","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
La fantaisie figure au rang de ces nombreuses notions problematiques dont le xixe siecle a le secret et a travers lesquelles le debat litteraire et artistique de l’epoque s’est construit. Etudier la fantaisie, c’est etre face a une notion que l’on sait au cœur des preoccupations esthetiques de tout un siecle a partir du romantisme mais qui ne se laisse pas reduire a une formule unique convaincante, c’est etre face a une evidence mais qui s’est jusqu’ici toujours refusee a etre fixee par aucune etiquette.La notion, tant alors qu’aujourd’hui, exerce une reelle seduction et tout se passe comme si le terme de fantaisie, comme l’a dit Bernard Vouilloux, tenait « sa force d’imposition du flou qu’il autorise 1 ». La fantaisie, a l’evidence, doit une part de son durable succes au fait qu’il semble s’agir d’une notion fourre‑tout, capable de se preter aux besoins de chacun, de se plier a toutes les contradictions. Tout en fascinant, elle egare tant elle est complaisante aux fantaisies de chacun. « En realite, nous avons “une certaine idee” de la fantaisie 2 » comme l’ont ecrit Jean‑Louis Cabanes et Jean‑Pierre Saidah, la remarque vaut aussi bien pour nous que pour la periode qui nous occupe. La notion est fuyante, glissante. On a tres vite fait, en effet, tout en croyant en parler, de parler d’autre chose et inevitablement de generer des confusions parasites, car il y a le mot sans la chose et la chose sans le mot. Un rapide survol des catalogues de bibliotheques suffit a s’en persuad
幻想是许多有问题的概念之一,这些概念在19世纪是保密的,这一时期的文学和艺术辩论就是通过这些概念建立起来的。研究仿制,这成为了对面一个众所周知的概念的核心关注esthetiques起了一整个世纪的浪漫,但不允许自己信服的减少了单一的公式,这屋子对面有个证据,但至今还是没有appucahon线上笔试通过了礼仪。这个概念,就像今天一样,具有真正的诱惑,一切似乎都发生了,就像Bernard Vouilloux说的,幻想这个词拥有“它所授权的模糊的强加力量”。幻想的持久成功在一定程度上要归功于这样一个事实,即它似乎是一个包罗万象的概念,能够满足每个人的需要,能够适应所有的矛盾。虽然她很迷人,但她对每个人的幻想都很宽容。正如Jean - Louis Cabanes和Jean - Pierre Saidah所写的那样:“事实上,我们对幻想有‘某种想法’。”这句话既适用于我们,也适用于我们所处的时期。这个概念是难以捉摸的。事实上,当我们认为我们在谈论它的时候,我们很快就会谈论其他的东西,不可避免地会产生寄生的混乱,因为有没有东西的词,也有没有词的东西。快速浏览一下图书馆目录就足以证明这一点。
{"title":"Fantaisie et histoire littéraire","authors":"Filip Kekus, Antoine Piantoni","doi":"10.58282/colloques.2579","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2579","url":null,"abstract":"La fantaisie figure au rang de ces nombreuses notions problematiques dont le xixe siecle a le secret et a travers lesquelles le debat litteraire et artistique de l’epoque s’est construit. Etudier la fantaisie, c’est etre face a une notion que l’on sait au cœur des preoccupations esthetiques de tout un siecle a partir du romantisme mais qui ne se laisse pas reduire a une formule unique convaincante, c’est etre face a une evidence mais qui s’est jusqu’ici toujours refusee a etre fixee par aucune etiquette.La notion, tant alors qu’aujourd’hui, exerce une reelle seduction et tout se passe comme si le terme de fantaisie, comme l’a dit Bernard Vouilloux, tenait « sa force d’imposition du flou qu’il autorise 1 ». La fantaisie, a l’evidence, doit une part de son durable succes au fait qu’il semble s’agir d’une notion fourre‑tout, capable de se preter aux besoins de chacun, de se plier a toutes les contradictions. Tout en fascinant, elle egare tant elle est complaisante aux fantaisies de chacun. « En realite, nous avons “une certaine idee” de la fantaisie 2 » comme l’ont ecrit Jean‑Louis Cabanes et Jean‑Pierre Saidah, la remarque vaut aussi bien pour nous que pour la periode qui nous occupe. La notion est fuyante, glissante. On a tres vite fait, en effet, tout en croyant en parler, de parler d’autre chose et inevitablement de generer des confusions parasites, car il y a le mot sans la chose et la chose sans le mot. Un rapide survol des catalogues de bibliotheques suffit a s’en persuad","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"92 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2015-10-06","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"123972958","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
[Aragon] s’est si bien souvenu de l’Alchimie du verbe, hier matin, devant la Samaritaine ! Il faut l’entendre sur l’esthetique commerciale. Son eloquence a la couleur de celle de Mouvement […] avec je ne sais quoi de tres enfantin : la voix, sans doute, et puis1…?On sait quelle fortune les formules rimbaldiennes rencontrent depuis plus d’un siecle aupres des ecrivains et des critiques, qui les brandissent avec plus ou moins de discernement. Il suffit de citer la plus fameuse, « il faut etre absolument moderne », pour qu’aussitot d’autres surgissent, « l’amour est a reinventer », « posseder la verite dans une âme et un corps », ou encore « la main a plume vaut la main a charrue », dont Breton se souvient avec emotion dans les Entretiens qu’il accorde a Andre Parinaud en 19512. Dans cet immense reservoir de notre modernite, le gout des « peintures idiotes », detaille dans le second des « delires » d’Une saison en enfer, est devenu la banniere archetypique d’une predilection moderne pour les arts populaires3. Privee de la suite de l’enumeration, la formule a fini par la synthetiser (et c’est en ce sens qu’elle sera ici employee), au risque d’en occulter des enjeux pourtant essentiels, comme le partage ambigu entre les arts visuels et verbaux, ou la disposition syntaxique heteroclite de l’ensemble. Or, c’est en lui restituant une coloration fantaisiste,discutee dans le texte rimbaldien, qu’il devient possible d’envisager son inscription dans une histoire litteraire qui vers la f
{"title":"Fantaisie des « peintures idiotes ». La génération surréaliste au défi de la beauté moderne","authors":"Adrien Cavallaro","doi":"10.58282/colloques.2561","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2561","url":null,"abstract":"[Aragon] s’est si bien souvenu de l’Alchimie du verbe, hier matin, devant la Samaritaine ! Il faut l’entendre sur l’esthetique commerciale. Son eloquence a la couleur de celle de Mouvement […] avec je ne sais quoi de tres enfantin : la voix, sans doute, et puis1…?On sait quelle fortune les formules rimbaldiennes rencontrent depuis plus d’un siecle aupres des ecrivains et des critiques, qui les brandissent avec plus ou moins de discernement. Il suffit de citer la plus fameuse, « il faut etre absolument moderne », pour qu’aussitot d’autres surgissent, « l’amour est a reinventer », « posseder la verite dans une âme et un corps », ou encore « la main a plume vaut la main a charrue », dont Breton se souvient avec emotion dans les Entretiens qu’il accorde a Andre Parinaud en 19512. Dans cet immense reservoir de notre modernite, le gout des « peintures idiotes », detaille dans le second des « delires » d’Une saison en enfer, est devenu la banniere archetypique d’une predilection moderne pour les arts populaires3. Privee de la suite de l’enumeration, la formule a fini par la synthetiser (et c’est en ce sens qu’elle sera ici employee), au risque d’en occulter des enjeux pourtant essentiels, comme le partage ambigu entre les arts visuels et verbaux, ou la disposition syntaxique heteroclite de l’ensemble. Or, c’est en lui restituant une coloration fantaisiste,discutee dans le texte rimbaldien, qu’il devient possible d’envisager son inscription dans une histoire litteraire qui vers la f","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"24 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2015-10-06","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"127798104","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
On sait les difficultes qui s’annoncent au chercheur voulant circonscrire et definir la Fantaisie. Quel regard critique porter en effet sur une notion dont les criteres sont censes echapper aux categorisations, et, comme l’ont note Jean‑Louis Cabanes et Jean‑Pierre Saidah, dont « l’essence est precisement de refuser toute essence »1 ? Cette apparente contradiction, une « petite troupe »2 de poetes s’y est vue confrontee lorsqu’il s’est agi de se construire et s’affirmer comme groupe dans le paysage litteraire francais du debut du xxe siecle. A partir des annees 1910, autour de Francis Carco, et avec pour figure tutelaire Paul‑Jean Toulet, s’est ainsi peu a peu constituee une « Ecole Fantaisiste » pour laquelle, notamment, le refus du manifeste eut valeur en soi de… manifeste ! Se mefiant de la declamation comme de la proclamation, ils etaient avant tout quelques amis (meme si certains ne se rencontrerent jamais), et ce lien fut peut‑etre le meilleur ciment permettant de les relier. Ainsi par exemple, les specialistes du groupe, a la suite de Carco lui‑meme, ont souvent note que Robert de la Vaissiere, dit Claudien3, par ses themes et son ecriture, apparaissait en marge des autres membres principaux que sont Jean‑Marc Bernard, Jean Pellerin, Tristan Dereme, Leon Verane, puis Philippe Chabaneix. On se propose ici d’interroger la notion de fantaisie replacee dans le contexte historique, puis dans les espaces generiques qui l'accueillent : peut‑on reperer des specificites de cett
我们知道,研究人员在界定和定义幻想时面临的困难。我们如何批判性地看待一个概念,这个概念的标准应该避免分类,正如Jean - Louis Cabanes和Jean - Pierre Saidah所指出的,“本质就是拒绝所有本质”在20世纪初的法国文学景观中,一个由诗人组成的“小剧团”面临着这种明显的矛盾,他们试图将自己塑造成一个群体。从1910年开始,在弗朗西斯·卡科(Francis Carco)周围,在保罗·让·图莱(Paul - Jean Toulet)的指导下,逐渐形成了一所“幻想学校”,对它来说,拒绝《宣言》本身就是一份宣言!他们既相信宣言,也相信宣言,他们首先是朋友(尽管有些人从未见过面),这种联系也许是把他们联系在一起的最好的粘合剂。例如,继Carco之后,小组的专家们经常注意到Robert de la Vaissiere,也就是Claudien3,通过他的主题和写作,出现在其他主要成员的边缘,包括Jean - Marc Bernard, Jean Pellerin, Tristan Dereme, Leon Verane,然后是Philippe Chabaneix。在这里,我们建议在历史背景下质疑幻想的概念,然后在欢迎它的一般空间中质疑幻想的概念:
{"title":"Fantaisie et théorie littéraire : richesses d’un paradoxe. Le cas des poètes Fantaisistes","authors":"Amandine Cyprès","doi":"10.58282/colloques.2565","DOIUrl":"https://doi.org/10.58282/colloques.2565","url":null,"abstract":"On sait les difficultes qui s’annoncent au chercheur voulant circonscrire et definir la Fantaisie. Quel regard critique porter en effet sur une notion dont les criteres sont censes echapper aux categorisations, et, comme l’ont note Jean‑Louis Cabanes et Jean‑Pierre Saidah, dont « l’essence est precisement de refuser toute essence »1 ? Cette apparente contradiction, une « petite troupe »2 de poetes s’y est vue confrontee lorsqu’il s’est agi de se construire et s’affirmer comme groupe dans le paysage litteraire francais du debut du xxe siecle. A partir des annees 1910, autour de Francis Carco, et avec pour figure tutelaire Paul‑Jean Toulet, s’est ainsi peu a peu constituee une « Ecole Fantaisiste » pour laquelle, notamment, le refus du manifeste eut valeur en soi de… manifeste ! Se mefiant de la declamation comme de la proclamation, ils etaient avant tout quelques amis (meme si certains ne se rencontrerent jamais), et ce lien fut peut‑etre le meilleur ciment permettant de les relier. Ainsi par exemple, les specialistes du groupe, a la suite de Carco lui‑meme, ont souvent note que Robert de la Vaissiere, dit Claudien3, par ses themes et son ecriture, apparaissait en marge des autres membres principaux que sont Jean‑Marc Bernard, Jean Pellerin, Tristan Dereme, Leon Verane, puis Philippe Chabaneix. On se propose ici d’interroger la notion de fantaisie replacee dans le contexte historique, puis dans les espaces generiques qui l'accueillent : peut‑on reperer des specificites de cett","PeriodicalId":177547,"journal":{"name":"Générations fantaisistes (1820-1939)","volume":"643 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2015-10-06","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"127537722","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}