En France, 15,9 % des étudiants (18–25 ans) apportent une aide significative et régulière à un proche malade ou souffrant d’un handicap et sont considérés comme des jeunes adultes aidants (JAA). Alors que ce rôle a des incidences multiples sur leur santé et leur trajectoire professionnelle, peu de travaux explorent leur vécu des situations de fin de vie et de décès du proche aidé. Quinze entretiens semi-directifs ont été conduits avec des JAA endeuillés, afin d’explorer leur vécu du diagnostic de la maladie au décès du proche aidé. Les résultats montrent que la période d’aidance est caractérisée par des expériences distinctes et des questionnements sur la singularité de ce rôle, influencés par le regard des autres. Lorsque survient la fin de vie du proche, le JAA est confronté à un fort sentiment d’impuissance devant la dégradation de l’état de santé du proche, cette période donnant lieu à la mise en place de stratégies mentales visant à se préparer au décès. Si l’expérience des JAA apparaît proche de celle des aidants adultes, l’étude met en avant la singularité des transitions de vie auxquelles ils font face et leur manque de reconnaissance, et plaide pour un soutien et un accompagnement renforcés de ces jeunes.
In France, 15.9% of students (aged 18–25 years) provide significant and regular assistance to a sick or disabled relative and are considered as Young Adult Carers (YACs). While this role has multiple implications for their health and career trajectory, few studies explore their experience with end-of-life situations and the death of the cared-for relative. Fifteen semi-structured interviews were conducted with bereaved YACs to explore their experience from the diagnosis of the illness to the death of the cared-for relative. The results show that the caregiving period is characterized by distinct experiences and reflections on the uniqueness of this role, influenced by societal perceptions. When the end of life of the relative approaches, the YAC is faced with a strong sense of powerlessness in the face of the deterioration of the relative's health, leading to the implementation of mental strategies to prepare for the death. While the experience of YACs appears similar to that of adult caregivers, the study highlights the uniqueness of life transitions they face and their lack of recognition, advocating for enhanced support and guidance for these young individuals.
Le projet de légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, désormais dénommés aide à mourir, inquiète de nombreux soignants pour lesquels « donner la mort n’est pas un soin ». Pour d’autres, l’aide à mourir constitue un progrès sociétal. Mais devant toute demande manifeste de mourir, se cachent toujours des désirs latents que les professionnels de soins palliatifs auront à questionner, confrontés à leur propre pulsion de mort, celle des patients et de leurs proches, celle de la société. La légalisation de l’aide à mourir peut en effet s’entendre comme l’expression d’un néolibéralisme qui nécessite que les équipes soignantes soient encore capables d’incarner la loi symbolique de l’interdit fondamental du meurtre, même si le législateur lui accorde des exceptions. Si meurtre il doit y avoir du côté des soignants, c’est avant tout un meurtre symbolique : celui du patient idéalisé du bien vieillir, du bien mourir, du bien naître. C’est aussi, paradoxalement, celui du « trop bon soignant ». À défaut, par un excès de culpabilité soignante et une défaite de la pensée, le patient risque d’être tué dans le réel… Mais ainsi en est-il du tragique de la vie.
Plans to legalize euthanasia and assisted suicide, now known as “aid in dying”, worry many caregivers, for whom “giving death is not care”. For others, assisted dying represents societal progress. However, in the face of any overt request to die, there are always latent desires that palliative care professionals will have to question, confronted as they are with their own death drive, that of patients and their loved ones, and that of society as a whole. The legalization of assisted dying can be seen as the expression of a neoliberalism that requires care teams to be able to embody the symbolic law of the fundamental prohibition of murder, even if the legislator grants exceptions. If there is to be murder on the part of caregivers, it is first and foremost a symbolic murder: that of the idealized patient of aging well, dying well, being born well. Paradoxically, it's also that of the “too-good” caregiver. Failing that, through an excess of caregiver guilt and a defeat of thought, the patient risks being killed in the real world… But so it is with the tragedy of life.