La particularité des lésions appelées brûlures est la dénaturation des protéines par atteinte directe des chaînes d’acides aminés ou par déstructuration de la conformation 3D.
Si la majorité des dénaturations protéiques est thermique, moins de 3 % sont d’origine chimique. Parmi elles, les corrosifs participent à 1/6 des mécanismes pour le brûlologue, correspondant aux phénols, crésols, phosphore blanc, aux sels de dichromate, au sodium métallique et aux lessives : ils agissent par dénaturation protéiques directes de contact.
Les autres agents chimiques non « corrosifs » sont les agents réducteurs (acide hydrochlorique, nitrique...), les oxydants (hypochlorite de sodium), les poisons protoplasmiques agissant par chélation d’ions vitaux (acide acétique, l’acide formique…), les vésicants provoquant une anoxie tissulaire ischémique et les dessiccateurs des tissus produisant une réaction thermique exogène responsable de brûlures secondaires.
Par une revue de la systématique de littérature (PRISMA sur Pubmed [« burns » and « chemical » and « corrosive agents » and « skin »] et de la littérature grise), l’objet de de cette présentation est de colliger les formes cliniques caractéristiques des lésions cutanées par corrosifs et leur temporalité.
Au total, 29 articles parmi 40 sont retenus pour analyses. Les éléments récurrents des atteintes selon leur degré d’exposition sont rapportés et discutés par rapport à l’activité du Centre de traitement de brûlés de Nancy.
En raison du caractère rare des brûlures chimiques, une solide connaissance théorique des mécanismes et formes cliniques est nécessaire aux conseils d’orientation des patients brûlés par corrosifs.
Les substances organophosphorées (OP) regroupent les pesticides organophosphorés (tels que le parathion, le dichlorvos, le chlorpyrifos) et les neurotoxiques organophosphorés (tels que le tabun, le sarin, le soman, le VX, les Novichoks…). Elles agissent en inhibant l’acétylcholinestérase (AChE), action qui explique la plupart de leurs effets toxiques, mais aussi la butyrylcholinestérase (BChE, également nommée pseudocholinestérase ou cholinestérase plasmatique). La détermination de leur activité enzymatique dans les prélèvements sanguins constitue des marqueurs biologiques en cas de suspicion d’exposition à une substance organophosphorée.
La détermination de l’activité BChE, disponible dans de nombreux laboratoires, est souvent réalisée en première intention pour des raisons techniques. Cette détermination permet d’objectiver rapidement l’exposition à une substance organophosphorée et d’évaluer sa rémanence dans le compartiment sanguin, sans toutefois permettre d’évaluer la sévérité de l’intoxication. Moins accessible en routine, la détermination de l’activité AChE érythrocytaire constitue l’indicateur le plus simple et le plus fiable de l’inhibition de l’AChE synaptique. Sa détermination permet d’évaluer la sévérité de l’intoxication, en gardant à l’esprit que l’état clinique du patient prime pour le diagnostic de gravité et que la voie de pénétration du toxique conditionne l’inhibition de l’AChE érythrocytaire. Ainsi, en cas de passage systémique faible (en cas d’exposition à des vapeurs par exemple), l’inhibition de l’AChE érythrocytaire est limitée malgré des signes cliniques parfois marqués (myosis, rhinorrhée, bronchoconstriction). La détermination de l’activité AChE érythrocytaire est également un témoin de l’efficacité du traitement par oxime et un meilleur marqueur de l’exposition.
Complémentaires, les déterminations des activités BChE et AChE érythrocytaire permettent d’évaluer le « statut cholinestérasique » (cholinesterase status) des patients intoxiqués et de guider leur prise en charge. L’intérêt de ce concept et les modalités pratiques de sa mise en application seront développés à partir d’un scénario d’étude.